Les spéculateurs seront de retour sur le marché agricole en 2010 et joueront un plus grand rôle dans la détermination des prix des céréales. Des prix qu'on devrait voir remonter, estime Joëlle Noreau, économiste principale chez Desjardins.

Devant quelque 300 délégués réunis hier à Victoriaville pour la première journée de l'assemblée annuelle de la Fédération des producteurs de cultures commerciales du Québec (FPCCQ), Mme Noreau a évoqué un relèvement graduel et modéré des prix des céréales en 2010. Force est de constater que les spéculateurs s'intéressent à ce qui s'en vient dans le secteur.

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«On voit déjà les spéculateurs plus présents depuis le début de l'année, a noté l'économiste. Après s'être concentrés sur le pétrole et les métaux, ils vont être tentés de placer leurs billes dans les denrées agricoles.»

Tant la FAO (Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture) que l'OCDE (Organisation de coopération et de développement économique) anticipent une hausse générale des prix en 2010, sans toutefois atteindre les niveaux de 2007 et 2008. L'USDA, ministère américain de l'Agriculture, prévoit des prix soutenus par une demande américaine de maïs pour l'éthanol, et les importations de soya de la Chine.

Il faudra aussi surveiller le prix du pétrole, qui fait bouger le prix de l'éthanol (et donc le prix du maïs) dans la même direction. Desjardins anticipe que le prix du baril montera graduellement jusqu'à atteindre 100$US en 2012.

Moins favorable pour le blé

Dans un proche avenir, le maïs et le soya pourraient attirer davantage les investisseurs, a indiqué Joëlle Noreau. «Les espoirs pour le blé ne sont peut-être pas aussi forts», précise-t-elle. La Commission canadienne du blé a récemment souligné que les prix sont mis sous pression par la grande disponibilité du blé sur le marché mondial.

C'est malheureux pour les producteurs québécois de céréales à paille (blé, orge, avoine), déjà dans une moins bonne situation que les producteurs de maïs ou de soya. «Dans les dernières années, la production d'éthanol et la diversification de la demande ont rétabli l'offre et ramené la valeur du maïs et de soya à un plus juste niveau, a expliqué à La Presse Affaires le président de la FPCCQ, Christian Overbeek. Mais il n'y a pas eu d'effet d'entraînement sur le prix des céréales à paille.» Le prix du blé a même reculé de plus de 20% en 2009.

La production de céréales à paille représente entre un quart et un tiers des cultures commerciales du Québec. «Leur situation face aux faibles prix du marché représente un de nos plus grands défis, dit Christian Overbeek. Il faut ouvrir de nouveaux marchés et améliorer la qualité des céréales.» Cela passe par la recherche, un élément auquel la FPCCQ accorde beaucoup d'importance et pour lequel elle a déjà déploré le manque d'investissement gouvernemental.

La recherche

Sur ce point, M. Overbeek a pu trouver une petite réjouissance hier. Le ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation (MAPAQ) renouvelle pour cinq ans le plan de financement du Centre de recherche sur les grains (CEROM), établi à Saint-Mathieu-de-Beloeil. La sous-ministre adjointe du MAPAQ, Hélène Vincent, en a fait l'annonce aux délégués de la Fédération.

Le ministère consacrera 7 millions de dollars sur cinq ans au CEROM, soit 80% de son budget total. La FPCCQ (1 375 000$) et la Coop fédérée (400 000$) complètent le financement.

Il y a un an, les producteurs de cultures commerciales ont décidé de tripler leur contribution à la recherche. Désormais, ils accumulent ensemble 450 000$ par année à cette fin. «Nous voulons qu'il y ait plus de recherche et une recherche plus efficace», dit M. Overbeek.

Devant l'assemblée, le président de la FPCCQ a indiqué que, dans les prochaines années, le CEROM mettra davantage l'accent vers l'amélioration des rendements, plutôt que sur la réduction des coûts de production.