La pluie a gâché l'été de plusieurs vacanciers québécois. Les agriculteurs aussi ont maugréé.

Les agriculteurs québécois n'aiment pas quand il pleut trop fort. Mais cette fois-ci, c'est surtout l'absence de soleil en juin et en juillet qui leur a déplu. L'abondance de soleil au début de la saison des récoltes est un élément essentiel à leurs succès - autant dans les champs à l'automne et dans les colonnes de chiffres de leurs états financiers à la fin de l'année.

«C'est surtout le manque de chaleur qui a affecté la récolte de 2009, dit Christian Lacasse, président de l'Union des producteurs agricoles (UPA). Il y a eu très peu de soleil en juin et en juillet, ce qui a créé des retards importants dans certaines cultures. Ça fait deux ans qu'on vit le même phénomène: un début de saison assez désastreux suivi de très beaux mois de d'août et septembre. Certaines cultures peuvent faire du rattrapage, mais ce n'est pas toujours possible.»

Les caprices de Dame Nature ont forcé plusieurs agriculteurs à faire le deuil d'une partie de leur récolte - jusqu'à 40% dans les champs de fraises et framboises. «Le problème au Québec, c'est que certaines cultures sont plus sensibles au climat, dit Sylvain Charlebois, professeur en marketing et spécialiste de l'industrie alimentaire à l'Université de Regina, en Saskatchewan. Certains produits demandent énormément d'eau à des moments précis durant l'été. Si la température ne collabore pas, les producteurs peuvent perdre jusqu'à 40% de leurs récoltes.»

Comme si les agriculteurs québécois n'en avaient pas assez de se battre contre la météo, ils doivent composer avec des surplus de production en provenance des États-Unis. Deux adversaires particulièrement coriaces cet automne: les producteurs de patates de l'Idaho et les producteurs de pommes de l'État de Washington. Avec les récentes avancées technologiques, ceux-ci peuvent conserver leurs récoltes plus longtemps.

«La concurrence des États-Unis est très forte et c'est clair qu'elle n'est pas appelée à diminuer, dit Christian Lacasse, président de l'UPA et producteur laitier à Saint-Vallier, dans la région de Bellechasse. À armes égales, nous sommes capables de les concurrencer. Mais nous sommes un pays nordique et l'agriculture est très subventionnée aux États-Unis. Ce sont à nos gouvernements à répondre à ça.»

Malgré ses nombreux défis, l'agriculture reste une industrie rentable au Canada selon Sylvain Charlebois. Au fil des ans, le professeur d'université s'est habitué aux doléances des agriculteurs. «Quand un agriculteur dit que la récolte a été bonne, ça veut dire qu'elle a été excellente, dit-il. Quand il a dit qu'elle a été correcte, elle a été bonne. Quand il dit qu'elle a été mauvaise, elle a été correcte...»

Une récolte sur fond de négos

Au moment où ils sont aux champs, les agriculteurs québécois attendent le verdict du gouvernement Charest sur leur régime d'assurance récolte. Géré par la Financière agricole du Québec, le régime est déficitaire de 305 millions de dollars par année. Un comité mixte gouvernement-producteurs estime que le déficit devrait passer à 650 millions afin de répondre convenablement aux besoins de l'industrie. Le ministre de l'Agriculture, Claude Béchard, doit annoncer sa décision le mois prochain. «Tout est sur la table», dit son attaché de presse Pascal D'Astous. Entre-temps, les agriculteurs québécois ont encaissé des indemnités d'assurance plus importantes cet été en raison des pluies abondantes. Au 22 septembre dernier, le programme d'assurance récolte a payé des indemnités de 7,5 millions de dollars aux producteurs, comparativement à 6,3 millions de dollars à pareille date l'an dernier. Cette hausse de 17% est principalement attribuable aux producteurs maraîchers (légumes), qui ont vu leurs indemnités passer de 3,1 à 4,1 millions ("29%). Les indemnités accordées aux producteurs de céréales (-48%) et de pommes (-23%) ont diminué. Curieusement, le nombre d'avis de dommages est en baisse cette année (5581 contre 5980 l'an dernier). Le programme est financé par les cotisations des agriculteurs (40%) et les gouvernements du Canada (36%) et du Québec (24%).