Propulsée par un courant d'engouement populaire dans la dernière décennie, l'industrie québécoise d'équipement de plein air évite jusqu'à maintenant le tourbillon de la récession. Mais la présence asiatique fait parfois figure de vents contraires.

Les détaillants comme les fabricants contactés par La Presse Affaires le reconnaissent : il existe depuis une dizaine d'années une tendance forte vers la pratique des activités de plein air. D'abord mode passagère, c'est devenu un mode de vie, remarque le président-directeur général du manufacturier de vêtements Chlorophylle, Laval Tremblay.

 

Et la récession peut même être une alliée pour l'industrie.

«On s'est bien sortis de l'hiver, note Yves Robert, directeur du marketing et des achats pour les magasins La Cordée. Il faut dire que nous dépendons plus des aléas de la température que de l'économie. On représente peut-être une valeur refuge dans des moments où les gens dépensent un peu moins. Les activités de plein air sont souvent très abordables.»

Selon Brigitte Galarneau, propriétaire de l'atelier de fabrication de sacs de couchage Sherpa, l'industrie du plein air va bien s'en tirer. «Je ne considère pas le plein air comme un luxe. C'est un style de vie.»

Encore l'Asie

Le directeur du marketing des magasins Sail et Baron, Richard Viger, remarque notamment une croissance du côté du kayak et de la raquette à neige depuis quelques années.

Faber et Compagnie, qui fabrique des raquettes à Québec depuis 1873, vit ainsi une période de progression. «L'industrie du plein air va bien. Mais manufacturer ici, ça va moins bien», dit le président Guy Faber.

M. Faber fait référence à la concurrence venue d'Asie, qui frappe plusieurs fabricants de l'industrie du plein air, comme dans bien d'autres secteurs manufacturiers.

«On n'est pas avantagés au niveau des prix, c'est certain, dit M. Faber. Il y a cinq ans, les détaillants nous voyaient comme morts. Mais ils sont aujourd'hui plus réceptifs. C'est plus in d'avoir un produit fabriqué au Canada. Et nos concurrents américains qui ont migré en Chine ont ralenti leurs activités de développement.»

Brigitte Galarneau, de Sherpa, fabrique tous ses produits à Bois-des-Filion, dans la couronne nord de Montréal.

«J'ai eu un gros souci autour des années 2002-2003, alors que mes clients se sont retournés vers la Chine, dit-elle. Mais je vois que la situation change en ma faveur. Ce n'est pas tout le monde qui est satisfait de ce qu'il reçoit comme marchandise. Il y a un certain contrôle de qualité qu'on ne peut pas avoir en Chine et il y a des risques de retard de livraison.»

Et à prix égal, les consommateurs sont de plus en plus sensibles aux produits fabriqués au Québec, note Yves Robert, de La Cordée.

Mais certaines entreprises estiment ne pas avoir le choix de délocaliser une partie de leur production pour être dans le coup. L'entreprise saguenéenne Chlorophylle ne produit plus que 15 à 25 % de ses produits au Québec.

«Il est devenu très difficile de trouver de la matière première (des tissus techniques) et des sous-traitants en Amérique du Nord, dit Laval Tremblay. On pourra difficilement revenir en arrière.»