8 novembre 2000, 10h

A. Jean De Grandpré rencontre ses deux courtiers de RBC Dominion, soit Georges Métivier et Pierre Petit. Dans un mémo interne rédigé par Paul Balthazard, le superviseur des deux courtiers, et que La Presse Affaires a obtenu, on résume comme suit l'information privilégiée transmise par De Grandpré à ses deux courtiers. «Incessamment, MTON (symbole boursier de Metro One Telecommunications) devrait annoncer qu'une compagnie européenne, Sonera, achètera une participation en actions représentant environ 25% du capital-actions de MTON et procurant une injection de fonds nouveaux d'environ 68 millions US. (De Grandpré) indique à Georges et à Pierre que cette nouvelle aura probablement une influence positive sur le titre et (pouvant) le pousser jusqu'à 25,00$.»

«Il n'y a pas d'oreilles qui nous écoutent», leur aurait-il dit avant de donner des détails sur l'information privilégiée. Pourquoi De Grandpré donne-t-il cette information privilégiée à ses deux courtiers?

 

«Du fait qu'il doit quitter pour la Floride le 17 décembre et qu'il devrait faire parvenir ses papiers d'options d'achat à nos bureaux... afin de pouvoir agir plus rapidement si nécessaire», écrit M. Balthazard.

M. De Grandpré, qui avait occupé le poste de président de conseil de Metro One durant les cinq précédentes années, détenait à ce moment-là, selon un rapport déposé à la SEC (Securities and Exchange Commission), un bloc de 222 071 actions de Metro One et 157 139 options.

9 novembre 2000

L'information privilégiée transmise la veille par M. De Grandpré au sujet de l'investissement de Sonera devient publique. L'entente officielle (à 17$US l'action) avait été conclue la veille, soit le 8 novembre (MTON fermait à 14,14 $US). Dans les mois qui ont suivi, l'action de Metro One a réussi à dépasser les 45,00$US.

16 novembre 2000

Paul Balthazard et son collègue André Gévry, de RBC Dominion, rencontrent M. De Grandpré dans le but de vérifier la teneur de l'information privilégiée qu'il avait donnée à ses deux courtiers, Métivier et Petit. À la fin de cette rencontre, M. Balthazard précise à M. De Grandpré «que notre démarche est interne et que nous ne désirions que sa collaboration afin de vérifier certaines informations quant aux agissements d'un de nos employés».

M. Balthazard résume sa rencontre avec De Grandpré dans une note qu'il envoie à Shirley Pridham, du service juridique de RBC Dominion.

20 novembre

RBC Dominion congédie George Métivier pour cause de délit d'initié.

Septembre 2002

Shirley Pridham, de RBC Dominion, est nommée membre du Conseil de section du Québec, de l'ACCOVAM.

12 février 2003

Jean De Grandpré quitte son poste d'administrateur au sein de Metro One.

20 août 2003

Le Conseil de section du Québec de l'ACCOVAM prononce un verdict de culpabilité de délit d'initié à l'encontre de Georges Métivier, l'accusant d'avoir acheté un lot d'options sur Metro One immédiatement après sa rencontre avec De Grandpré. Bien qu'il ait revendu sans profit ledit lot d'options le lendemain matin, avant même la publication du communiqué de presse de Metro One, l'ACCOVAM l'a suspendu pour 10 ans, et 40 000$ d'amende et frais.

17 février 2005

L'estimant «excessive», le Bureau de décision et de révision en valeurs mobilières (BDRVM) ramène la suspension de M. Métivier à trois années.

20 février 2009

L'Autorité informe M. Métivier qu'elle n'a pas le pouvoir de déroger aux décisions de l'ACCOVAM et du BDRVM.

31 mars 2009

Dans un communiqué, Georges Métivier se dit victime d'une opération de cover-up et il reproche à l'Autorité de renoncer à son devoir d'enquêter et de poursuivre tous ceux qui ont collaboré à cette opération de tuyautage, dont plus particulièrement RBC Dominion et l'ACCOVAM.

Notez que M. De Grandpré, lui, n'a pas effectué de transactions sur le titre durant la séance du 8 novembre 2000.