Des revenus en baisse, le retour en force des déficits et des dépenses d'infrastructure qui pèsent lourd sur les finances publiques. Résultat: la dette québécoise frôlera les 135 milliards de dollars à la fin du prochain exercice.

Le Québec - qui a déjà la dette la plus lourde des provinces en fonction de la taille de son économie - verra donc son boulet financier augmenter de quelque 10 milliards en deux ans, selon les estimations fournies à La Presse Affaires par deux institutions financières.

 

En cette veille de budget provincial écrit à l'encre rouge, les économistes de Desjardins et de la Toronto-Dominion [[|ticker sym='T.TD'|]] prévoient tous deux que le déficit budgétaire, avant même d'ajouter les milliards d'un éventuel plan de relance, avoisinera les 4 ou 5 milliards de dollars en 2009-2010.

Chez Desjardins, l'économiste en chef adjoint, Yves St-Maurice, prévoit que la dette nette du Québec passera alors de 123 milliards à la fin mars de 2008 à plus de 134 milliards au printemps 2010. Et il précise: «On a fait nos prévisions avec une baisse de 1,3% du PIB (produit intérieur brut ). Là, on est rendus autour de 2,2% de baisse.»

À la TD, l'économiste Pascal Gauthier mise sur une dette de 133 milliards à la même date, avant les mesures pour relancer l'économie, précise-t-il. Pour l'année suivante, il mise sur une dette à 138,5 milliards.

«La question qu'on peut se poser, c'est si, sur un horizon de quatre ou cinq ans, on va être capable de résorber ce déficit-là, demande M. Gauthier. Ça va être très difficile de comprimer la croissance des dépenses. C'est là que le défi va se poser.»

Hier, le Banque Scotia [[|ticker sym='T.BNS'|]] y est aussi allée de prévisions sombres pour l'économie du Québec, tablant sur un recul de 2,5% de son économie cette année.

Dans son dernier budget, Québec avait prévu verser 6,9 milliards pour les seuls intérêts sur sa dette cette année. Ça équivaut à la moitié du budget du ministère de l'Éducation. Les taux d'intérêt historiquement bas ont toutefois permis quelques économies, selon un porte-parole du ministère des Finances, Jacques Delorme.

Le cancre canadien

Comme bien d'autres économies occidentales, le Québec va voir sa dette augmenter en fonction de la taille de son économie. De 41,1% du produit intérieur brut en 2007-2008, la dette nette avoisinera les 45% cette année (44% selon la TD et 45,5% selon Desjardins).

À cet égard, le Québec est le cancre de la famille canadienne. Les 41% du poids de la dette québécoise se comparent à 24% en Ontario, 12% en Colombie-Britannique et 34% pour le gouvernement fédéral.

Dans une note publiée le mois dernier, l'agence de notation Moody's démontre que, pendant les cinq dernières années de croissance, le Québec n'a pas réussi à réduire - comme la majorité des autres provinces ont su le faire - le poids de sa dette par rapport à ses revenus. Le tableau dans cette page montre que les autres provinces ont réussi soit à réduire leur dette, soit à augmenter leurs revenus ou à réduire leurs dépenses.

«Nous, on n'a pas fait la job, explique l'économiste de Desjardins en parlant du Québec. On n'a jamais réussi à dégager des surplus intéressants. Quand il y a un surplus, soit on le dépense, soit on l'envoie en baisse d'impôts.»

Un plan, plaide Moody's

Depuis 2001, Moody's a amélioré la cote de crédit du Québec à trois reprises, saluant récemment la création du Fonds des générations, cette cagnotte gérée par la Caisse de dépôt et censée compenser l'augmentation de la dette.

En février, écrivant sur la situation économique des provinces, l'agence new-yorkaise a averti que, «pour que nos cotes de crédit des provinces canadiennes demeurent inchangées, leurs plans fiscaux doivent mettre en oeuvre des politiques dont l'objectif est d'améliorer leurs profils de crédit - c'est-à-dire réduire le poids de la dette - quand le ralentissement économique sera derrière nous».

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NETTE OU BRUTE, LA DETTE?

Les économistes consultés travaillent surtout avec la dette nette, celle qui tient compte des avoirs de la province et les soustrait de la dette brute. Cette dernière est donc plus élevée. À titre d'exemple, dans le dernier budget, Québec prévoyait une dette brute de 151,7 milliards pour 2009- 2010. La dette nette, elle, devait atteindre 129,7 milliards. Mais tous ces chiffres, c'était avant le ralentissement économique.