En collaboration avec HEC Montréal, nous publions notre chronique hebdomadaire sur les défis auxquels font face les entreprises au plan de la gestion.

Le phénomène du vieillissement de la population québécoise est bien connu. En 2006, au Québec, plus de 40% des patrons d'entreprises avaient plus de 50 ans. En faisant l'hypothèse d'un retrait des affaires vers 60 ans, on comprend qu'un important changement s'amorce à la tête des entreprises.

 

Dans ce contexte, la problématique de la relève se pose avec beaucoup d'acuité. Les futurs successeurs des dirigeants actuels sont-ils identifiés? Seront-ils prêts? A-t-on élaboré une stratégie pour ce faire?

À ces questions, plusieurs dirigeants répondront que, par les temps qui courent, ils ont d'autres chats à fouetter. Comme me le disait l'un d'entre eux: «Si tu veux que cette entreprise soit à reprendre dans cinq ans, laisse-moi m'en occuper maintenant.» Et pourtant, la crise ne sera pas éternelle. La relève constitue une préoccupation à moyen ou long terme pour toute entreprise et l'ignorer n'est pas une option, au même titre que le développement de nouveaux produits ou l'équilibre de la structure de financement. La relève doit faire partie intégrante de la planification stratégique de l'entreprise, de son plan d'action qui regroupe les décisions importantes sur son avenir.

À la Chaire de développement et de relève de la PME, nos recherches nous ont amenés à considérer que la problématique de la relève peut être abordée en trois étapes: réfléchir, choisir, agir.

En premier lieu, le dirigeant doit réfléchir aux options qui s'offrent à lui. La transmission à un membre de la famille peut-elle être envisagée? Ou plutôt à une équipe de cadres? Qu'en est-il de la vente à un tiers? Ou d'une combinaison de ces options? Pour alimenter cette réflexion, le dirigeant doit considérer à la fois ce qui est possible et ce qui semble souhaitable à ses yeux. Il doit donc s'interroger sur le potentiel de continuité de l'entreprise, sa volonté de s'impliquer plus ou moins intensément dans l'entreprise pendant et après la période de transmission, le mode de rachat envisagé (don, vente progressive ou en bloc, ampleur et échéance du solde de vente consenti).

Cette réflexion mérite d'être structurée. Elle ne doit pas être menée en vase clos mais inclure des discussions avec les personnes concernées, éventuellement les membres de la famille ou certains cadres. Le dirigeant devrait également échanger avec des personnes crédibles à ses yeux: un dirigeant qui est déjà passé par là, un membre du conseil d'administration, ses conseillers financiers, un ami. Cet exercice l'amènera à la deuxième étape, celle du choix d'une option. Ce choix pourra évoluer avec le temps. Tout au long de la mise en oeuvre de son plan, le dirigeant sera appelé à le réévaluer et à le modifier selon les circonstances. Il est malgré tout essentiel d'amorcer le processus en ayant d'abord arrêté son choix sur une option.

La troisième étape est celle de l'action. Comme la transmission d'une entreprise est un processus qui s'échelonne (idéalement) sur plusieurs années, il vaut la peine d'élaborer un plan d'action. Rappelons aussi que ce processus comprend deux dimensions: la transmission de la direction et la transmission de la propriété.

Qu'il s'agisse de transmettre à la famille ou à une équipe de cadres, il est possible d'identifier un certain nombre d'éléments clés à incorporer à ce plan. Pour la transmission de la direction, il faut, entre autres: clarifier les attentes des parties prenantes, rédiger un plan stratégique pour l'entreprise, établir des critères de choix ainsi qu'un plan de préparation de la relève et déterminer la stratégie de désengagement du dirigeant. Pour la transmission de la propriété, il faut: régler les enjeux de l'équité et de la propriété, déterminer la juste valeur de l'entreprise, choisir un mode de rachat en prenant en compte les aspects juridiques et fiscaux de la transaction et élaborer un montage financier conséquent.

Dans le cas de la vente à un tiers, les étapes sont un peu différentes, notamment dans la préparation de la relève. Il n'en demeure pas moins que cette vente doit faire l'objet d'une planification si on veut en optimiser les résultats.

Dans tous les cas, il faut insister sur l'importance de communiquer à toutes les étapes du processus et d'aller chercher l'aide nécessaire auprès de spécialistes dans le domaine.

En terminant, nous aimerions mentionner l'existence d'un site web élaboré par la Chaire (www.durevealareleve.com). Il contient une mine d'informations pour aider dirigeants et entrepreneurs à amorcer le processus de relève: des textes, des outils, des témoignages qui leur permettront de réussir la transmission et ce, à l'avantage de tous.

L'auteure est titulaire de la Chaire de développement et de relève de la PME à HEC Montréal.