Des malheureux qui hurlent devant des tables et des chaises qui bougent, qui tremblent en regardant la chute d'un météorite, qui sont transis dans une maison qu'ils croient hantée... La peur est désormais utilisée par des annonceurs de tout type pour attirer l'attention vers leur marque. Ces derniers mois, des Benjamin Moore et autres Nivea se sont payé la tête des consommateurs en les impliquant malgré eux dans des aventures terrifiantes.

Qui n'a pas encore vu, sur YouTube, la vidéo qui fait la promotion du film d'horreur Carrie 2013 dans laquelle la cliente d'un café repousse tables, chaises et même un client grâce à un pouvoir télékinésique incontrôlé? Ou encore celle, réalisée au Chili pour les écrans plats LG, dans laquelle, pour montrer la qualité des images, on simule la chute d'un météorite?

Quand ce n'est pas arrangé avec le gars des vues (lire: des comédiens embauchés pour jouer de faux clients stupéfaits), on croirait que ces mauvais tours causent des crises cardiaques! On est loin du sympathique défi James Bond Skyfall de Coca-Cola dans une gare l'an dernier...

Vue 41 millions de fois

Certains ne ratent pas leur coup! La vidéo de Carrie a été vue en deux semaines plus de 41 millions de fois. Une autre, dans laquelle on fait croire à des voyageurs dans un aéroport qu'ils sont recherchés pour faire la promotion d'un déodorant antistress de Nivea, compte plus de 7,3 millions de visionnements en quelques mois. Mais de tels scénarios font-ils vendre le produit?

«Si c'est en lien direct avec la marque, comme la vidéo de Carrie, la rétention va se faire, estime Frédéric Gonzalo, stratège en marketing, communications et médias sociaux. Mais dans le cas des écrans LG, on peut ne pas se souvenir que la vidéo a été faite pour cette marque. Et dans celui de Nivea, il y a un sentiment d'inconfort. C'est de mauvais goût. Parfois, le stunt devient la vedette au détriment de la marque.»

Le coup des écrans LG a récolté 4 millions de visionnements en moins de 36 heures. «De tels stunts, en devenant viraux, nous permettent de capter l'attention d'un très large auditoire, et ce, très rapidement, explique Court Elliott, directeur principal, communications de marques de LG Électroniques Canada. Même si, comme dans ce cas-ci, la vidéo a été réalisée au Chili.

«Cela dit, à la base, on ne fait pas de «vidéos virales», ajoute Court Elliott. Elles peuvent le devenir si c'est divertissant, que le sujet est universel et qu'on comprend facilement le scénario.»

Souvent viral par accident

«Il faut vraiment que ce soit spectaculaire et audacieux pour que ça devienne viral, ajoute Nicolas Massey, vice-président, codirecteur de création, Montréal, de l'agence de pub Publicis Canada. Remarquez que, bien souvent, ça devient viral par accident.»

Le coup de LG ne se serait pas traduit directement par des ventes, selon LG. «Mais ça a assurément renforcé la marque et prouvé la qualité des écrans LG», mentionne Court Elliott.

«Reste que c'est efficace, estime Nicolas Massey qui a créé des concepts semblables pour Ubisoft. Mais c'est quelque chose qu'on envoie à ses amis et qui se consomme rapidement. Pour que ça reste, il faut appuyer ça par autre chose, en lien avec le produit.»

Si la tendance se maintient, comme dirait l'autre, YouTube devrait être le théâtre d'autres coups fumants, sous peu. «Ces vidéos vont rester, juge Frédéric Gonzalo. Le gag du gars qui se fait prendre est universel. On le constate avec ceux de Juste pour rire depuis des années. Et pour se démarquer, on continuera de repousser les limites.»

«Les gens ont soif de ça, comme pour les films d'horreur, poursuit Nicolas Massey. Et les annonceurs nous demandent de plus en plus de contenu à faible coût et de très bonne qualité.»