La semaine dernière, l'agence de publicité kps+p (fruit de la fusion entre Allard Johnson et l'américain Kirshenbaum Bond Senecal + Partners en octobre 2010) laissait tomber le p de son nom et son logo. Même si ses dirigeants montréalais avaient jugé pertinent d'adopter au Québec l'acronyme de l'entreprise, les simples lettres restaient une acrobatie linguistique pour bien des gens.

«Les clients qui connaissaient bien Allard Johnson nous ont dit: comment allons-nous faire pour nous souvenir des lettres? raconte le président Mario Daigle. Je me suis dit, si mes enfants ne sont pas capables de se rappeler du nom de la compagnie où travaille papa, quelque chose cloche! Les gens sont habitués aux acronymes, à des KPMG et des BBDO, mais ces dernières entreprises sont bien établies.»

«C'est une grosse tendance de simplifier les noms», note Sonya Bacon, vice-présidente exécutive de l'agence Bleublancrouge qui a piloté le changement de nom du cabinet comptable RSM Richter Chamberland.

Car on dit désormais Richter. «Le changement est survenu parce qu'un des associés (Denis Chamberland) a quitté l'entreprise et parce qu'il y avait une volonté d'expansion canadienne», raconte Sonya Bacon. Avec Richter, on revient à la base, à un nom que le cabinet a déjà eu.»

Le changement est supporté par une campagne publicitaire télévisée. «Richter évolue dans un milieu compétitif, où les PricewaterhouseCoopers (PwC), Deloitte et Raymond Chabot Grant Thornton optent pour des stratégies de marque et publicitaires fortes», dit Sonya Bacon.

«De nombreux cabinets comptables et d'avocats portent plusieurs noms, car chaque associé tient au sien, souligne Frédéric Metz, auteur du livre Design? Mais les gens les oublient. Les associés doivent faire preuve de modestie. Le cerveau enregistre beaucoup mieux un nom simple.»

Les annonces de kbs+ et Richter surviennent au moment où RIM s'est publiquement rebaptisée BlackBerry, soit lors de la présentation de son téléphone Z10.

«L'entreprise aurait dû faire ce changement depuis un siècle, estime Frédéric Metz. C'est idiot d'avoir un produit et porter un nom différent. Là, on se rapproche du public et ce n'est pas la première fois que ça se produit. En bout de ligne, c'est souvent lui qui a raison. Je pense à Federal Express qui est devenu FedEx comme le prononçait la clientèle.»

D'autres entreprises changent de nom pour faire état de leurs champs d'expertise. Ainsi, cette semaine, La Presse Télé est devenue LP8 Média (dont l'identité visuelle a été conçue par Écorce). «Je trouvais La Presse télé limitatif, dit Marleen Beaulieu, présidente de la maison de production. Ça ne reflétait pas tout ce qu'on offre, comme la fiction, les quiz et la production web. Je ne trouvais plus actuel le mot «télé».»

Changer de logo ou de nom est-ce risqué? «Non, dans notre cas, répond Marleen Beaulieu. C'est de l'air frais. On se renouvelle.»

«Changer complètement de nom l'est, pense toutefois Frédéric Metz. Mais ça peut être bénéfique sur du long terme.»

Trois conseils aux entreprises qui veulent changer de nom et/ou de logo

1. «On change quand il le faut. Quand un associé d'une firme quitte, par exemple. On ne change jamais selon l'humeur du président de l'entreprise. Et il doit y avoir des experts 5 étoiles qui chapeautent un tel changement.» - Frédéric Metz

2. «Le nom doit être à la fois simple et évocateur, car on veut améliorer les choses. Les gens sont constamment bombardés de messages. Ce que RIM a fait, en devenant BlackBerry, est tout simplement logique.» - Mario Daigle.

3. «C'est bon de partir des acquis pour ne pas qu'il y ait une dissonance dans l'industrie. Il faut capitaliser sur ce qui a été bâti et le faire évoluer» - Sonya Bacon.