L'économie chinoise ne connaîtra pas d'«atterrissage brutal», à en croire le premier ministre chinois Li Keqiang: il s'est efforcé jeudi de rassurer sur la capacité de Pékin à enrayer l'alarmant essoufflement de sa croissance tout en poursuivant ses douloureuses réformes structurelles.

Alors que les nuages s'accumulent au-dessus du géant asiatique, la Chine cherche à convaincre des marchés fébriles qu'elle a encore les moyens de gérer ses déséquilibres économiques et de stimuler l'activité.

«L'économie en Chine est faite de difficultés et d'espoirs mêlés. Mais fondamentalement, les espoirs dépassent de loin les difficultés», a lancé M. Li à l'occasion d'une conférence de presse de deux heures clôturant la session annuelle du Parlement chinois.

Un exercice bien rodé: le Premier ministre, qui s'exprimait sous les chandeliers dorés du Grand palais du Peuple -- dans une salle néanmoins perméable à la nocive pollution atmosphérique extérieure -- répondait à des questions approuvées à l'avance par les autorités.

Alors que la croissance chinoise a glissé l'an dernier à 6,9%, au plus bas depuis un quart de siècle, le gouvernement «possède des outils innovants» de relance pour contrer tout ralentissement économique trop violent, a insisté M. Li.

Le matin même, l'Assemblée nationale populaire (APN), chambre d'enregistrement législative du régime, avait adopté à 97,2% le treizième plan quinquennal. Cette feuille de route socio-économique assigne au pays un objectif de croissance d'au moins 6,5% par an durant la période 2016-2020.

Pour Li Keqiang, en dépit du vif assombrissement de la conjoncture, il apparaît «impossible» de ne pas atteindre les objectifs fixés.

Douloureuse transition

«Tant que nous persistons dans les réformes et l'ouverture, l'économie chinoise ne connaîtra pas d'atterrissage brutal», a ajouté le dirigeant, en référence au scénario catastrophe d'un effondrement de la deuxième économie mondiale.

Pékin est engagé dans un délicat rééquilibrage de son modèle de croissance vers les services, les nouvelles technologies et la consommation intérieure.

Mais la transition se fait dans la douleur: le secteur industriel souffre de colossales surcapacités face à une demande terne, les exportations s'effondrent et les investissements immobiliers stagnent.

«Le gouvernement contrôle des activités dont il ne devrait pas s'occuper, qui plombent la productivité du pays» et il échoue à maintenir un environnement concurrentiel équitable, a cependant reconnu Li Keqiang.

Une allusion aux puissantes entreprises d'État en cours de restructuration, des mastodontes gérés sans souci de rentabilité et exerçant leur monopole sur des secteurs industriels entiers.

Pour autant, la réduction drastique des surcapacités qu'imposera Pékin dans la sidérurgie et le charbon se poursuivra «sans vagues de licenciements» de masse, a souligné le premier ministre.

Une assurance qui peut surprendre: le gouvernement avait récemment évoqué la disparition d'environ 1,8 million d'emplois dans les secteurs du charbon et de l'acier. Et plusieurs milliers de mineurs ont entamé ce week-end une grève dans le nord-est de la Chine pour réclamer le paiement d'arriérés de salaires.

«Oeuvres caritatives»

«Réformes et développement ne sont pas incompatibles», a martelé le premier ministre, assurant que le pays n'était qu'au début d'un processus d'urbanisation et de transformations qui verront émerger de nouveaux moteurs de croissance.

En multipliant les rabais fiscaux et en réduisant significativement les procédures administratives -- entre autres --, le gouvernement espère favoriser «l'innovation» et «l'entrepreneuriat».

Li Keqiang s'est par ailleurs voulu rassurant sur la solidité des marchés boursiers -- en proie depuis l'été à de vives turbulences --, ainsi que sur l'inquiétante montée des créances douteuses au sein des établissements bancaires, confrontés à des risques accrus de défauts de paiement.

«Le haut niveau d'endettement des entreprises n'est pas un problème nouveau», a-t-il tempéré, suggérant que des «mécanismes comme l'émission d'actions pour remplacer des créances existantes» pourraient permettre de réduire les risques.

Enfin, en vue de conforter la nette réduction de la pauvreté prévue par le nouveau plan quinquennal, l'ANP a également adopté mercredi une «loi sur les oeuvres caritatives».

Le texte est destiné à encourager les dons de la part des «bons Samaritains», même si certains observateurs s'inquiétaient de la manière dont il sera appliqué par des gouvernements locaux souvent réticents.

La Chine n'est classée que 144e sur 145 en matière de dons, selon une étude publiée l'an dernier par l'organisation britannique Charities Aid Foundation.

Échaudés par une série de scandales et de malversations, les citoyens chinois n'auraient donné en 2015 que l'équivalent de 0,2% du PIB du pays, selon des chiffres officiels.