La communauté internationale, réunie à Lima, a augmenté vendredi ses engagements financiers pour lutter contre le réchauffement climatique et adopté un vaste plan d'action pour mettre au pas les multinationales fuyant l'impôt.

À deux mois de la conférence de Paris sur le climat, environ 15 milliards de dollars supplémentaires par an ont été promis par les banques de développement pour freiner la hausse du thermomètre mondial, selon le ministère français des Finances.

« Nous attendions beaucoup des banques multilatérales (...) et elles ont été au rendez-vous », s'est félicité le ministre français des Finances Michel Sapin dans la capitale péruvienne, à l'issue d'une réunion climat à laquelle quelque 50 pays et institutions ont participé.

Ce montant et de nouvelles contributions des États viendront s'ajouter aux 62 milliards de dollars annuels déjà alloués par la communauté internationale pour soutenir financièrement les pays du Sud dans la lutte contre le réchauffement de la planète.

Ce nouvel effort a été notamment apporté par la Banque mondiale, la Banque africaine de développement et la Banque européenne de reconstruction et de développement, qui se sont engagées à augmenter la part de leurs investissements consacrés à des projets verts.

L'objectif de 100 milliards par an d'ici à 2020 semble désormais être à portée de main même si des contributions du secteur privé seront décisives.

« Nous ne sommes pas au bout, il y a encore du chemin devant nous. Ce sont souvent les derniers pas qui sont les plus difficiles », a ajouté M. Sapin, tandis que son homologue des Affaires étrangères Laurent Fabius, saluait une bonne « dynamique ».

Lutte contre l'optimisation fiscale

Rassemblées au Pérou pour l'assemblée générale FMI-Banque mondiale, les grandes puissances avaient plus tôt dans la journée célébré un moment « historique » après avoir approuvé un plan de lutte contre l'optimisation fiscale.

« Il ne s'agit pas simplement de redresser nos finances publiques mais également de regagner la confiance de nos citoyens », a déclaré Angel Gurria, le secrétaire général de l'OCDE qui a supervisé la création de ce mécanisme.

Le dispositif, qui doit recevoir en novembre lors du sommet du G20 d'Antalya l'onction des chefs d'États et de gouvernement, vise à freiner les techniques d'optimisation fiscale qui feraient perdre jusqu'à 240 milliards de dollars par an de recettes fiscales aux États.

Élaboré depuis trois ans, ce plan d'action doit compliquer la tâche des grandes entreprises qui font « disparaître » leurs bénéfices ou les transfèrent dans des territoires à faible fiscalité « où ne se déroule aucune activité économique », détaille l'OCDE.

Google, Starbucks et Apple dans le collimateur des autorités

Les géants américains Google, Starbucks ou Apple ont récemment été dans le collimateur des autorités pour avoir ainsi artificiellement fait fondre leur ardoise fiscale.

« Ce n'est pas une question de payer des impôts élevés ou faibles, il s'agit simplement de payer des impôts » a relevé le ministre britannique des Finances, George Osborne.

Le Luxembourg, accusé d'avoir accordé des tarifs fiscaux à des multinationales, s'est associé à ce mouvement en appelant à mettre en place des « conditions de jeu équitables pour tous ».

Le plan doit désormais entrer dans une phase délicate de mise en oeuvre. « Il faut que ce soit appliqué sans quoi ce ne sera qu'un bout de papier », a déclaré le ministre allemand des Finances Wolfgang Schäuble.

Un plan favorable aux pays riches ?

L'ONG Oxfam s'est montrée très critique, en jugeant que ce plan « servait les intérêts des pays riches » et qu'il ne traitait pas tous les États sur un « pied d'égalité ».

Les pays pauvres sont, de fait, en embuscade et espèrent ne pas être tenus à l'écart de ce dispositif qui vient compléter un arsenal permettant déjà l'échange automatique de données bancaires pour lutter contre l'évasion fiscale des particuliers.

Ces deux avancées ont en tout cas quelque peu éclipsé les inquiétudes sur l'économie mondiale qui se sont fait jour depuis le début de la semaine au Pérou, premier pays sud-américain à accueillir une assemblée FMI-Banque mondiale depuis près de 40 ans.

La venue de ces institutions n'a toutefois pas été du goût de tous. Tenus à l'écart du centre de conférences par des barrages policiers, quelque 2000 manifestants ont défilé aux cris de « Banque mondiale, terreur universelle » ou « Impérialistes, go home! ».

Photo ERNESTO BENAVIDES, AFP

En marge de la réunion du FMI et de la Banque mondiale, quelque 2000 manifestants ont défilé aux cris de « Banque mondiale, terreur universelle » ou « Impérialistes, go home! ».

Manifestation

Par ailleurs, plusieurs milliers de personnes ont défilé vendredi à Lima pour dénoncer les «recettes» du FMI et de la Banque mondiale qui tiennent cette semaine leur assemblée générale dans la capitale péruvienne.

Aux cris de «Banque mondiale, terreur universelle» et «Assez des recettes du FMI», les manifestants ont marché pendant trois heures dans le calme, tenus à l'écart du centre de conférences par d'innombrables barrages policiers.

Réunis à l'appel d'un syndicat, ils entendaient également témoigner d'une réalité du Pérou différente de celle brossée par les deux institutions.

«La croissance économique du Pérou dont parle le Fonds monétaire international n'a pas profité aux travailleurs mais aux entreprises», a affirmé Domingo Cabrera, un responsable syndical, accusant également l'institution de défendre une baisse des salaires dans la fonction publique.

Mercredi, des manifestants avaient déjà protesté contre le système utilisé par la Banque mondiale pour classer les pays en fonction de leurs revenus.

C'est la première fois en près de cinquante ans qu'une assemblée générale du FMI et de la Banque mondiale se tient en Amérique du sud.