La Lettonie est officiellement devenue dans la nuit de mardi à mercredi le 18e pays membre de la zone euro, malgré de fortes réticences de la population de ce pays de deux millions d'habitants.

Avec les feux d'artifice saluant à minuit l'arrivée du Nouvel An, les Lettons ont dit adieu à leur devise nationale, le lats introduit en 1993 pour remplacer le rouble de l'ère soviétique.

Peu après minuit, le premier ministre letton, Valdis Dombrovskis, a symboliquement retiré d'un distributeur un billet de 10 euros, en compagnie de son homologue estonien, Andrus Ansip, lors d'une cérémonie à la banque publique Citadele de Riga.

«C'est une grande opportunité pour le développement économique de la Lettonie», a-t-il déclaré, en insistant sur la nécessité de dépenses «responsables» pour éviter un endettement excessif, la clé de toute réussite future, selon lui.

Tous les distributeurs de billets fonctionnaient normalement mercredi, selon les banques du pays, dont beaucoup avaient ouvert quelques guichets en ce 1er janvier, jour férié, afin d'aider les particuliers qui pourraient avoir des problèmes avec le changement de monnaie.

«Le passage à l'euro se passe bien», a assuré la banque suédoise SEB, la deuxième plus importante en Lettonie.

Dans le centre de Riga, personne ne faisait la queue devant les distributeurs de billets mercredi matin au moment où les fêtards émergeaient dans les rues après une nuit de libations.

«Nos clients ont réglé leurs notes en euros sans aucun problème ce matin», dit à l'AFP l'hôtelier Uldis Sebris.

La Banque centrale européenne (BCE) a salué mercredi l'entrée de la Lettonie dans la zone euro.

«Au nom du conseil des gouverneurs de la BCE, je salue ce nouvel élargissement de la zone euro. La Lettonie a gagné sa place de partie intégrante de l'union économique et monétaire», a déclaré le président de la BCE, Mario Draghi.

En conséquence de l'entrée du pays dans la zone euro, la banque centrale lettone, Latvijas Banka, rejoint l'Eurosystème, qui rassemble la BCE et l'ensemble des banques centrales des pays membres, et contribue désormais au budget annuel de l'institution monétaire de Francfort, à hauteur de 0,28% du budget total, soit plus de 30,5 millions d'euros.

Flambée des prix?

La Lettonie est le deuxième pays balte et le quatrième pays ex-communiste de l'Europe centrale et orientale à adopter la monnaie commune après la Slovénie en 2007, la Slovaquie en 2009 et l'Estonie en 2011.

Le pays avait espéré adhérer à l'euro dès 2008, mais la crise mondiale a ruiné cet espoir, le produit intérieur brut (PIB) letton chutant de 25% en 2008-2009, la plus grave récession au monde, à la suite de laquelle Riga est parvenu à réaliser un redressement économique spectaculaire.

La Lituanie devrait suivre en 2015, complétant le trio balte des anciennes républiques soviétiques dans une zone euro qui n'est pas encore tout à fait sortie d'affaire alors que cinq pays (Espagne, Chypre, Grèce, Irlande, Portugal) ont bénéficié de plans de sauvetage.

Les autres candidats d'Europe centrale et orientale n'ont pas vraiment hâte de rejoindre le club.

Certains, comme la Hongrie ou la Bulgarie, sont loin de respecter les critères requis. D'autres, comme la Pologne et la République tchèque, voient des avantages à garder leurs monnaies nationales pendant encore un certain temps.

Les Lettons craignent une flambée des prix. Selon un sondage réalisé en décembre par l'institut SKS, 25% d'entre eux approuvent le passage à l'euro et 50% sont contre. Les autres restent indécis ou sans opinion.

«Les prix vont peut-être augmenter. Tant pis. Mon salaire va augmenter aussi et ça ira bien», déclare cependant avec optimisme à l'AFP Karlis, dans un bar du quartier populaire de Teika à Riga.

Depuis le mois d'octobre, tous les prix sont affichés en lats et en euros.

Les deux monnaies vont circuler en Lettonie jusqu'à la mi-janvier, avant que l'euro ne se substitue complètement au lats.

Quinze ans après le lancement de l'euro en 1999, environ 333 millions d'Européens utilisent désormais la même monnaie.