La Suisse, face aux pressions internationales pour lutter contre la fraude fiscale, va probablement devoir finir par abandonner le secret bancaire qui a fait sa réputation, a estimé un des principaux experts en la matière dans une interview publiée samedi.

«Je doute que la Suisse puisse y échapper,» a déclaré Luc Thevenoz, chef du Centre de Droit bancaire et financier de Genève, au journal Le Temps, en parlant de l'échange automatique d'informations bancaires avec les autorités fiscales d'autres pays.

En Suisse, le secret bancaire est considéré, au nom de la protection de la vie privée, comme aussi inviolable que le secret médical, et les autorités ont jusqu'à présent refusé de modifier cette donne qui a fait du pays un paradis pour ceux qui avaient des fonds à placer discrètement.

Mais «la situation a changé», estime M. Thevenoz. Il cite la décision récente du Luxembourg d'accepter enfin cet échange automatique d'informations avec les autres pays de l'UE à partir de 2015, l'accord signé dans le même sens avec les États-Unis, faute de quoi les banques suisses n'auraient plus pu travailler dans ce pays, et le récent rejet par le Parlement allemand de l'accord bilatéral dont les mesures ont été jugées trop favorables aux fraudeurs.

«Nous avons vu qu'il suffisait de peu de choses pour donner une image négative de la Suisse et nous mettre dans le même panier que certains centres offshore de moins bonne réputation. Pour la Suisse, qui a aussi d'autres intérêts que ceux de sa place financière, c'est insupportable», a-t-il conclu.

Ces commentaires font suite à l'appel vendredi du G20 à la mise en place d'un standard international sur l'échange d'informations bancaires pour lutter contre la fraude fiscale.

«Nous avons intérêt à participer à la définition d'un standard international plutôt que de nous le voir imposer», a encore estimé M. Thevenoz.