Le Conseil Constitutionnel a infligé samedi un camouflet au président François Hollande en annulant la taxation à 75% pour les plus riches contribuables, la mesure la plus emblématique et contestée de son gouvernement.

Aussitôt après cette décision, le premier ministre, Jean-Marc Ayrault, a annoncé qu'un nouveau dispositif serait présenté dans le cadre «de la prochaine loi de finances» et qu'il serait «conforme aux principes posés par la décision du Conseil constitutionnel».

Saisi par les parlementaires UMP, le Conseil (www.conseil-constitutionnel.fr) a estimé que la taxe de 75% sur les revenus supérieurs à 1 million d'euros prévue pour deux ans et contenue dans le budget 2013, méconnaissait le principe d'égalité des charges.

Elle est en effet «assise sur les revenus de chaque personne physique» alors que l'impôt sur le revenu est prélevé «par foyer».

En annonçant le 28 février son intention de créer une telle super-taxe sur les super-riches, qui ne figurait pas dans ses «60 engagements» de son quinquennat, le candidat socialiste à l'Élysée a créé la surprise.

Cette mesure était rapidement devenue symbolique de sa volonté de mettre les plus fortunés à contribution pour rétablir les finances publiques du pays au nom du patriotisme en cette période de crise persistante.

Malgré un faible rendement --elle devait toucher environ 1500 personnes, qui auraient payé en moyenne 140.000 euros à ce titre--, elle constituait un marqueur de la présidence Hollande.

Très contestée à droite et par les patrons des grandes entreprises, elle a vite fait scandale avec en point d'orgue l'annonce de l'exil fiscal en Belgique du comédien Gérard Depardieu.

Concrètement, explique-t-on au Conseil, avec cette taxation, un ménage, dont chaque membre percevrait un revenu de 900 000 euros, se trouverait exempté, tandis qu'un autre, dont un seul membre gagnerait 1,2 million d'euros et l'autre rien, devrait l'acquitter, ce qui constituerait à l'évidence une «rupture d'égalité au regard de la faculté contributive».

Le Conseil a retoqué également les modalités de calcul du plafonnement de l'Impôt de solidarité sur la fortune (ISF), en particulier l'intégration des revenus ou bénéfices capitalisés, «que le contribuable n'a pas réalisés ou dont il ne dispose pas».

Cette mesure pouvait aboutir dans les faits, à ce que les impôts dépassent les 75%, voire 100% des revenus réellement perçus.

Les sages ont aussi décidé de réduire l'avantage fiscal pour les investissements outre-mer. Alors qu'il était prévu de plafonner à 10 000 euros la plupart des avantages fiscaux des différentes niches fiscales, le budget 2013 comprenait un plafond majoré de 18 000 euros et 4% du revenu imposable pour les investissements en outremer ou pour le financement en capital d'oeuvres cinématographiques.

Le Conseil a estimé que ce système «permettait à certains contribuables de limiter la progressivité de l'impôt sur le revenu dans des conditions entraînant une rupture d'égalité devant les charges publiques». En conséquence il a annulé la fraction de l'avantage d'un montant égal à 4% du revenu imposable.

Les membres du Conseil ont en outre décidé de supprimer le régime dérogatoire applicable aux successions sur les immeubles situés en Corse. Ce dispositif, ancien, conduisait, «sans motif légitime» pour le Conseil, à ce que la transmission d'immeubles soit exonérée de droits de succession.

S'il a validé l'instauration d'une nouvelle tranche marginale à 45% de l'impôt sur le revenu, le Conseil a considéré que pour les «retraites-chapeau» la taxation particulière à 75,04% en 2012 et 75,34% en 2013 était «confiscatoire» et l'a ramenée à 68,34%.

S'agissant du budget 2012 rectifié, le Conseil l'a validé globalement avec son important crédit d'impôt compétitivité et emploi (CICE), mesure phare du pacte de compétitivité issu du rapport Gallois qui prévoit un coup de main de 20 milliards d'euros aux entreprises.