Le marché de la dette va connaître une semaine sous haute tension avec une série d'émissions en zone euro, en premier lieu du Portugal que les marchés voient, en dépit des démentis officiels, comme le prochain État à devoir solliciter l'aide européenne.

Après un début d'année calme, le Portugal, l'Espagne et l'Italie viennent tous cette semaine emprunter de la dette à moyen et long terme.

Pour Thomas Mayer, économiste en chef de Deutsche Bank, le marché est confronté à «une poussée d'émissions qui va prendre de l'ampleur».

Mais celles-ci surviennent dans un contexte économique hautement délicat, notamment pour l'Espagne et le Portugal qui sont, depuis plusieurs semaines, dans la ligne de mire des marchés en raison de l'ampleur de leurs déficits et de leurs faibles perspectives de croissance.

Les taux d'emprunt de ces pays ne cessent de grimper et évoluent désormais à des niveaux record: les taux espagnols sont à 5,5% tandis que ceux du Portugal ont dépassé les 7%.

Autrement dit, ces États doivent s'acquitter d'un taux d'intérêt conséquent - quasi rédhibitoire - pour emprunter sur les marchés.

Dans ces conditions, l'appétit des investisseurs, en particulier étrangers, pour les titres de dette reste sujet à caution, en particulier en ce qui concerne le Portugal, le plus sévèrement soumis à la pression des marchés.

«Le vrai test pour Lisbonne, ce sera mercredi: les investisseurs vont-ils répondre présents ?», résume Cyril Beuzit, stratégiste chez BNP Paribas.

Le Portugal a prévu d'émettre deux lignes d'obligations, à 3 et 10 ans, pour un montant compris entre 750 millions et 1,25 milliard d'euros, après être resté à l'écart du marché pendant presque deux mois sur de telles maturités.

«La taille annoncée de l'opération n'est pas si importante mais le climat est très lourd pour toutes les dettes périphériques (dettes des pays les moins bien notés, NDLR)», soulignent les analystes de Crédit Agricole CIB.

Désormais, après la Grèce et l'Irlande, le Portugal est considéré comme le prochain pays susceptible de recourir à l'aide européenne, en dépit des dénégations répétées de son gouvernement et de la mise en place d'un sévère programme d'austérité pour ramener le déficit public à 4,6% fin 2011.

Pour empêcher tout risque de contagion à l'ensemble de la zone euro, les gouvernements allemand et français presseraient même Lisbonne à demander cette aide financière, selon l'hebdomadaire allemand Der Spiegel. Des informations de presse démenties par Berlin, Paris et la Commission européenne elle-même.

Mais, du côté des stratégistes, la demande d'aide du Portugal fait de moins en moins de doute. «Il n'y a pas beaucoup d'alternatives, le Portugal va devoir faire appel au Fonds européen de stabilité financière (EFSF)» le fonds de soutien dont la création a été décidée au plus fort de la crise grecque, affirme M. Beuzit.

Jeudi, ce sera au tour de Madrid de passer le test du marché en procédant à une émission à 5 ans, dans l'espoir d'emprunter 2,5 milliards d'euros.

L'Espagne sera en concurrence avec l'Italie qui, le même jour, va procéder à des émissions à 5 et 15 ans pour un montant encore non communiqué.

Ces opérations seront logiquement scrutées par les investisseurs, qui surveilleront si la demande est bien au rendez-vous et si les taux sont plus élevés que lors des dernières émissions du même type.

Pour Rainer Guntermann de Commerzbank, le marché devrait «passer ces tests avec succès mais il y en aura d'autres, surtout en avril/mai, quand de gros remboursements arriveront à échéance», prévient-il.