La crise traversée par l'Irlande offrait jeudi une forte impression de déjà vu du point de vue du Fonds monétaire international, qui envoie dans ce pays une mission dix mois après celle qui avait préludé à son plan de sauvetage pour la Grèce.

Des fonctionnaires internationaux entameront leurs travaux vendredi à Dublin pour conseiller un gouvernement en sérieuse difficulté financière, et dont les créanciers doutent de plus en plus de la capacité à combler son déficit.

«Nous ne sommes pas dans des discussions sur un programme d'aide aujourd'hui. Nous avons des discussions techniques», a affirmé jeudi, lors d'un point de presse à Washington, la porte-parole du FMI Caroline Atkinson.

Le FMI a beau vouloir couper court à toute spéculation sur un prêt au pays, l'enchaînement des événements rappelle la crise grecque, inévitablement.

En janvier, «à la demande des autorités», le FMI avait envoyé à Athènes une mission du même type «pour examiner l'éventualité d'une assistance technique».

Pendant trois mois, on avait entendu des démentis quant à l'imminence d'un prêt et des déclarations rassurantes sur la capacité du pays à prendre les mesures nécessaires, tandis que le prix des obligations grecques descendait aux enfers.

Après des tractations entre gouvernements de la zone euro sur l'opportunité d'impliquer le FMI, la Grèce, au bord de l'asphyxie, demandait formellement l'aide du Fonds et de ses partenaires en avril, et obtenait le mois suivant 110 milliards d'euros de prêts au versement étalé sur trois ans.

Malgré toutes les dissemblances entre ces deux économies aux confins de la zone euro, les financiers étaient convaincus jeudi d'une issue identique pour l'Eire.

«L'Irlande suivra probablement, après une période de tergiversations qui pourrait favoriser la contagion à d'autres pays», a estimé Enam Ahmed, analyste de l'agence Moody's à Londres. D'après lui, les pays de la zone euro ont été «de nouveau pris en embuscade par les marchés» et leur pari contre les titres de dette du pays.

L'un des plus grands investisseurs obligataires, le directeur général du fonds américain Pimco Mohamed El-Erian, allait plus loin en estimant que le FMI pouvait régler les «problèmes de liquidités» de l'Irlande à court terme, mais ne s'attaquait pas à ses «problèmes de solvabilité» à plus long terme.

«Si on continue à reporter le problème à plus tard, le Portugal sera le prochain sur la liste. Et si on continue à reporter le problème après celui-là, alors la question sera: et l'Espagne?», a-t-il prévenu, sur la chaîne CNBC.

Officiellement, le FMI n'en est même pas au point où il compte prêter son argent à l'Irlande. Il considère que «les Européens ont largement la capacité d'agir, autant que nécessaire et quand ça l'est», a indiqué Mme Atkinson.

Mais jusqu'à l'annonce de la mission mardi, il disait que le gouvernement irlandais avait annoncé les mesures qui s'imposaient et n'avait pas besoin de ses conseils.

La porte-parole du Fonds a été interrogée sur les raisons de ce changement.

«Vous savez aussi bien que moi que ce qui s'est produit entre-temps, c'est qu'il y a eu des pressions des marchés, et en réaction à cela, le gouvernement irlandais s'est préoccupé, les Européens également, de trouver la meilleure façon d'essayer simplement de renforcer la stabilité financière en Irlande pour poser les bases d'une reprise solide», a-t-elle justifié.