Le ministre irlandais des Finances, Brian Lenihan, a démenti catégoriquement vendredi une rumeur de marché selon laquelle l'Irlande aurait demandé l'aide du fonds de sauvetage de l'Union européenne (UE) pour résoudre ses difficultés budgétaires.

«L'État est entièrement financé jusqu'en juin prochain et nous avons d'importantes réserves (...) donc ce pays n'est pas du tout dans une situation où il devrait faire appel à ce fonds», a déclaré M. Lenihan sur la radio publique RTE.

«Pourquoi demander une telle aide dans ces circonstances? Cela n'aurait aucun sens. Cela signalerait aux marchés que nous ne sommes pas capables de gérer nos propres affaires», a-t-il poursuivi, ajoutant: «Nous devons garder notre sang-froid pendant cette période difficile.»

Peu après, un porte-parole du ministère des Finances a démenti avec la même fermeté la tenue de discussions entre l'Irlande et l'UE en vue d'une telle demande d'aide, évoquée par certains médias malgré les déclarations du ministre.

«Il n'y a aucune discussion relative à une demande de financement d'urgence de l'Union européenne», a indiqué ce porte-parole.

Ces rumeurs interviennent au moment où les investisseurs s'inquiètent de plus en plus de la capacité du gouvernement irlandais, en proie à un déficit astronomique (32% cette année), à redresser les finances publiques.

Le premier ministre, Brian Cowen, dispose d'une majorité fragile, alors que le Parlement doit se prononcer début décembre sur un budget de rigueur.

M. Lenihan a répété que le gouvernement faisait tout ce qui était en son pouvoir pour redresser la barre et a mis les inquiétudes des marchés, qui ont fait grimper les taux d'intérêt des emprunts d'État irlandais à de nouveaux records cette semaine (près de 9%), sur le compte de problèmes échappant à son emprise.

«Quand les marchés restent aussi agités, ce n'est clairement pas de la faute de l'Irlande. C'est lié à un problème international plus général», a dit le ministre.

Il a notamment critiqué l'idée lancée par l'Allemagne de faire payer aux investisseurs privés une partie du sauvetage des États en déroute financière, ce qui a selon lui contribué involontairement à l'envolée des taux de la dette irlandaise.

«Les commentaires suggérant que l'Irlande ne pourrait pas émettre de dettes sans qu'elles soient automatiquement soumises à un partage du fardeau (entre public et privé, ndlr) ont fait beaucoup de dégâts, car ils nous ont coupés du marché», a-t-il expliqué.

«Si vous dites à votre banquier que vous ne voulez pas payer (vos dettes), cela a des conséquences dramatiques, et si nous avions décidé que c'était notre politique, cela aurait provoqué une vraie crise», a-t-il résumé.

M. Lenihan avait auparavant salué la clarification apportée sur ce sujet par plusieurs pays européens en marge du G20, en se félicitant de ce signe de «solidarité».

Les ministres des Finances des cinq pays européens participant au G20 (Allemagne, France, Royaume-Uni, Italie et Espagne) ont publié vendredi à Séoul une déclaration conjointe pour tenter de ramener la confiance sur les marchés.

Ils ont réaffirmé que les discussions au sein de la zone euro sur des mécanismes de résolution de futures crises plus contraignants pour les investisseurs privés ne concernaient pas les pays actuellement en difficultés, faisant ainsi allusion à des États comme l'Irlande, et assuré que tout futur mécanisme ne s'appliquerait qu'à partir de la mi-2013.

Enfin, le ministre a démenti que les difficultés du secteur bancaire irlandais pourraient encore s'aggraver et rendre leur sauvetage encore plus ruineux pour les finances publiques, un scénario qui alimente l'anxiété des investisseurs. Selon lui, l'état du secteur bancaire a été évalué correctement et les sommes suffisantes ont été provisionnées.

Juncker nie lui aussi

Le gouvernement irlandais n'a pas demandé d'aide financière européenne pour résoudre ses difficultés budgétaires, a affirmé vendredi le chef de file des ministres des Finances de la zone euro, Jean-Claude Juncker, démentant des rumeurs de marché en ce sens.

«La question n'a pas été posée» par l'Irlande, a déclaré M. Juncker, lors d'une conférence de presse à Luxembourg.

Cependant, «si l'Irlande demandait de l'aide, elle l'aurait dans le cadre du Fonds de stabilité financière de la zone euro», a-t-il ajouté.

Interrogé pour savoir si le gouvernement irlandais s'était entretenu en ce sens avec des responsables européens, M. Juncker a répondu que «comme il s'agissait d'entretiens avec (s)es collègues, ils ne sont pas publics».

«Mais il n'y a rien de grave en cours», a-t-il insisté.

Interrogé enfin concernant les fortes tensions de ces derniers jours sur les taux d'emprunts irlandais et portugais, M. Juncker a indiqué qu'il «sui(vait) la situation de près».