Le gouvernement prépare de plus en plus les esprits des Français à des «efforts supplémentaires» pour réduire le déficit dès 2011, François Fillon ayant reconnu vendredi pour la première fois que des «augmentations d'impôts» sont à l'ordre du jour.

«Si la croissance devait se révéler un peu moins dynamique que prévu, nous ne devrions pas reculer devant la nécessité de réaliser des efforts supplémentaires», a déclaré le premier ministre lors d'une conférence de presse.

La France s'est engagée à résorber rapidement son déficit public, attendu cette année au niveau record de 8% du produit intérieur brut (PIB). Elle devra le réduire de 40 milliards d'euros dès l'an prochain, pour le ramener à 6%, puis à 3% en 2013.

Mais pour l'instant, le plan français repose essentiellement sur l'espoir d'un fort rebond de la croissance, de 2,5% par an à partir de 2011, qui engendrerait mécaniquement d'abondantes recettes fiscales pour combler le trou des finances publiques.

Face aux réserves émises par Bruxelles, le Fonds monétaire international (FMI) et la Cour des comptes, qui jugent ces prévisions «optimistes» et demandent à Paris de préparer de nouvelles mesures à mettre en oeuvre en cas de reprise plus molle, le gouvernement s'est résolu ces derniers jours à annoncer, par petites touches, un nouveau tour de vis dans le budget 2011 qui sera présenté en septembre.

La ministre de l'Économie, Christine Lagarde, a d'abord reconnu que la prévision de croissance était «un peu audacieuse», tout en repoussant au mois d'août une probable révision à la baisse.

Ce raisonnement a été repris vendredi par François Fillon. Qui l'a poussé un peu plus loin en tirant par avance les conséquences d'une telle révision: «en fonction de la situation», l'effort de réduction des niches fiscales et sociales, ces exonérations d'impôts ou de cotisations qui représentent un énorme manque à gagner pour les comptes publics, pourra passer de 5 à 8,5 milliards d'euros entre 2011 et 2013.

Le premier ministre a ainsi semblé confirmer les propos du secrétaire général de l'Élysée, Claude Guéant, qui évoquait lundi «d'autres annonces» d'ici l'automne en matière de réduction des déficits, avant que la présidence ne minimise ces déclarations.

Parallèlement, des informations de presse sur un probable gel des salaires des fonctionnaires dans les années à venir n'ont pas été démenties officiellement.

Vendredi, se posant en garant de la discipline budgétaire, son crédo depuis son arrivée à Matignon, François Fillon s'est permis au passage de briser un tabou. Il a reconnu que le coup de rabot aux niches fiscales correspondait bien à «des augmentations d'impôts», alors que le président Nicolas Sarkozy a toujours martelé qu'il n'avait «pas été élu pour augmenter les impôts».

En revanche, le chef du gouvernement ne touche pas à l'autre tabou de la majorité: la rigueur.

«Il y a des pays qui baissent les rémunérations des fonctionnaires, il y a des pays qui licencient des fonctionnaires (...) il y a des pays qui augmentent de plusieurs points la TVA. Si on était amené un jour à mener une politique comme celle-là, oui je dirai que c'est une politique de rigueur», a-t-il plaidé. «Pour l'instant, ce que nous essayons de faire, c'est d'éviter cette politique-là.»

Christine Lagarde venait pourtant de donner raison, sur le fond, à ceux qui estiment que l'austérité a déjà pris des allures de rigueur. Interrogée sur ce mot honni, elle a répondu: «je peux dire que nous devons avoir une politique responsable et rigoureuse. Est-ce différent? Non!»