Le «prêteur alternatif» Centria tentera d'accroître sa présence dans le financement de projets immobiliers au Québec, avec le lancement d'un nouveau fonds d'investissement de 75 millions de dollars le mois prochain.

«Au Québec, 75 millions, c'est énorme, a fait valoir Jean Gamache, président et chef de l'exploitation de Centria, en entrevue à La Presse Affaires. Si on levait 150 millions, on n'aurait pas suffisamment de projets pour 150 millions.»

Peu connue du grand public, l'entreprise de Laval se spécialise dans le financement de projets de construction résidentielle depuis le début des années 2000. Centria se présente comme «le plus important prêteur alternatif privé au Québec», avec des investissements totalisant 1,5 milliard de dollars depuis 11 ans.

Le nouveau fonds qui sera lancé le 1er mai permettra à Centria de diversifier ses activités. «Ce qu'on fait dans ce fonds-là, c'est de l'équité et des prêts-mezzanine pour accompagner les promoteurs dans toutes les catégories de produits, que ce soit de la tour de bureaux, des condos, du commercial, sur des projets de 25 à 50 millions», a expliqué Jean Gamache.

Pour un projet de 40 millions de dollars, par exemple, Centria investira entre 3 et 7 millions. Comme les prêts-mezzanine fournis par l'entreprise s'apparentent à des prêts de second rang, les taux d'intérêt demandés sont plus élevés - entre 7 % et 15 % - , ce qui permet de générer un rendement intéressant pour ses investisseurs.

Caisses de retraite

Même si le nouveau fonds n'est pas officiellement lancé, Centria affirme avoir déjà levé 45 des 75 millions en capitaux nécessaires. «Et on aura des fonds institutionnels, des fonds de pension, qui vont mettre de l'argent à l'intérieur de ça aussi, a souligné M. Gamache. Leur processus est toujours plus long, ce sera complété à l'été.»

Centria affirme regarder une vingtaine de projets d'investissements potentiels à l'heure actuelle.

Avec ses fonds déjà existants, Centria finance surtout des projets résidentiels de 1 à 15 millions de dollars, comptant entre 12 et 60 unités, et bâtis à l'intérieur de 12 mois. «On ne fait pas le financement des tours du centre-ville, à côté du Centre Bell», souligne le président, un type de projet de grande envergure où le Fonds immobilier FTQ est très actif.

Centria vient «compléter l'offre des banques», en offrant des conditions de financement «plus flexibles» qui permettent un démarrage plus rapide des projets. L'entreprise a ainsi permis à plusieurs promoteurs de lancer la construction d'immeubles de condos sans aucune prévente, alors que les banques exigent en général 60 %.

Parmi les partenaires de longue date de Centria, on compte entre autres les constructeurs immobiliers Trigone, Cholette et Groupe Mathieu. Au total, le groupe dit avoir contribué au financement de 8500 unités depuis 11 ans.

Gouvernance

Même si sa firme offre des prêts dits «alternatifs», Jean Gamache insiste: la saine gouvernance est au coeur des préoccupations de Centria. Les nombreux scandales qui ont miné l'industrie de la construction au cours des dernières années ont mis un accent encore plus aigu sur cet enjeu, avance-t-il.

«Nos livres sont tous ouverts. Et nous avons des comités de placement et crédit qui autorisent nos transactions; ce n'est pas nous qui le faisons. Habituellement, pour les fonds comme nous, c'est le président et le premier VP qui autorisent les dossiers. On a un comité de placement indépendant d'experts, qui n'a aucun lien avec la business, qui sont des sommités dans leurs domaines.»

Centria a par ailleurs un fonds qui offre du financement temporaire aux entreprises, par exemple dans le cadre d'une restructuration.