Quel ralentissement? Loin de voir le marché immobilier québécois perdre son élan, la SCHL s'attend à ce que la revente atteigne en 2012 et 2013 des niveaux jamais vus depuis au moins 15 ans.

Dans ses prévisions dévoilées hier, la Société canadienne d'hypothèques et de logement estime qu'il y aura 81 300 transactions résidentielles au Québec cette année (+5,3 %), et 82 100 l'an prochain (+1 %). Le sommet des 15 dernières années remonte à 2007, alors que 80 647 propriétés avaient changé de main dans la province.

La SCHL entrevoit en outre des hausses de prix soutenues, même si elles seront moins salées que pendant la dernière décennie. La valeur de revente moyenne devrait ainsi atteindre 271 600 $ cette année (+3,8 %) et 277 800 $ l'an prochain (+2,3 %).

Selon David L'Heureux, analyste principal de marché à la SCHL, ce maintien du marché québécois s'explique par la faiblesse des taux d'intérêt et par des « facteurs démographiques » comme l'immigration.

Dans tout ce portrait, seule la construction neuve ralentira d'ici la fin de 2013 au Québec. Après le recul de 5,8 % enregistré l'an dernier, l'organisme fédéral prévoit un repli de 6,2 % cette année, puis un autre de 7,3 % l'an prochain. Les mises en chantier tomberont ainsi à un creux de 10 ans, avec 42 100 propriétés entamées.

À l'échelle canadienne, la SCHL prévoit une hausse de 6,8 % des mises en chantier cette année, qui sera suivie d'un recul équivalent l'an prochain. Le nombre de transactions devrait toutefois continuer à progresser (+1,9 % et +0,6 %), tout comme les prix moyens (+1 % et +2,5 %).

Trop d'optimisme?

Le ton de plusieurs économistes s'est assombri au cours des derniers mois quant à la trajectoire du marché canadien. Le niveau historiquement élevé des prix, tout comme la surconstruction possible de condos à Toronto, Vancouver et Montréal, soulèvent de vives inquiétudes. Certains experts s'attendent à des baisses de prix de l'ordre de 5 à 10%, parfois plus.

«Il semble que la SCHL soit en retard par rapport au consensus des économistes», a observé Ben Rabidoux, analyste à la firme torontoise M Hanson Advisors, qui se montre très pessimiste envers le marché national.

Le secteur de l'immobilier n'a jamais pesé aussi lourd dans l'économie canadienne, en terme de nombre d'emplois et de participation au PIB, note M. Rabidoux. Selon lui, le retour à des niveaux de prix plus «soutenables» aura un impact important sur l'économie du pays.

L'analyste s'inquiète par ailleurs de la construction effrénée de condos à Montréal. Il estime que la métropole québécoise vient au deuxième rang des marchés les plus «laids» du Canada, derrière Vancouver, et cela, malgré les vives craintes qui entourent Toronto. «Il y a une surconstruction majeure.»

Marie-Claude Guillotte, économiste chez Valeurs mobilières Banque Laurentienne, estime pour sa part que le marché du condo neuf à Montréal est «le plus à risque de subir un ralentissement plus prononcé» au pays. Un risque d'autant plus élevé que le nombre de propriétés invendues sur le marché de la revente est en progression constante.

Quoi qu'il en soit, la SCHL entrevoit une progression du marché montréalais cette année et l'an prochain. Le nombre de reventes devrait grimper de 5,3% et 1,4%, tandis que les prix moyens progresseront de 3,8% et 2,8%, pour s'établir à 335 000$ à la fin de 2013 dans la région métropolitaine.

La SCHL prévoit aussi des reculs de 11,5% et 5,5% des mises en chantier dans le Grand Montréal.