Le virage résidentiel amorcé il y a un an par Ivanhoé Cambridge s'avère payant, au point où le bras immobilier de la Caisse de dépôt compte doubler ses investissements dans le secteur d'ici trois ans.

Le segment résidentiel compte aujourd'hui pour 7% des actifs sous gestion d'Ivanhoé Cambridge, qui totalisent près de 32 milliards de dollars. Une proportion que Sylvain Fortier, président de cette division, veut faire passer entre 10 et 15% dans les 36 prochains mois.

«On voit des occasions intéressantes, il y a beaucoup de partenariats brisés et de dettes qui viennent à échéance en 2012, a-t-il dit hier pendant une conférence immobilière. Disons que 2012 sera une grosse année pour ça. Le téléphone sonne beaucoup ces jours-ci...»

Ivanhoé Cambridge est assis sur «des milliards» en liquidités, rappelle M. Fortier. Les immeubles de bureaux et les centres commerciaux canalisent encore la vaste majorité des investissements du groupe, mais les placements faits dans l'immobilier résidentiel au cours des derniers mois ont démontré le fort potentiel de ce secteur.

Le groupe a notamment allongé 150 millions en février pour acheter 207 logements répartis dans quatre immeubles du centre de Londres. «La croissance est telle qu'on pourrait vendre maintenant en faisant le profit qu'on pensait faire en cinq ans», a dit Sylvain Fortier.

Ivanhoé Cambridge a aussi marqué un grand coup dans la Silicon Valley, en Californie, qui connaît un boom fulgurant en raison de la forte croissance du siège social d'Apple. La firme y a acheté 1400 logements en deux transactions séparées au cours des derniers mois.

«La régie locale autorise une augmentation de 8% par année des loyers... ce qui est un peu plus agressif qu'à Montréal», a indiqué avec le sourire M. Fortier.

Pendant la dernière année, Ivanhoé Cambridge a ajouté 2800 appartements à son parc locatif, qui compte aujourd'hui 6900 unités réparties dans 35 immeubles. La firme vise des immeubles de bonne taille dans 10 villes ciblées, dont Montréal, Toronto, New York, San Francisco, Londres et Paris.

La crise américaine a profité à Ivanhoé. «Aux États-Unis, les gens sont moins propriétaires qu'ils ne l'étaient, les gens louent davantage que dans le passé, a confié M. Fortier à La Presse Affaires. Dans les grands centres, on entend de plus en plus que c'est OK to rent.»

Concurrence féroce

Le bras immobilier de la Caisse représente aujourd'hui l'un des plus importants investisseurs institutionnels à l'échelle mondiale. La concurrence est forte pour les actifs de qualité, reconnaît Sylvain Fortier. «Tout le monde regarde les mêmes marchés et on voit les mêmes très gros acteurs partout.»

Aussi, Ivanhoé Cambridge est tiraillé entre les objectifs de rendement attendus de ses épargnants, d'une part, et les mesures de prudence mises en place après les pertes historiques de 40 milliards enregistrées par la Caisse en 2008, d'autre part.

«On est assis sur beaucoup d'argent, ce qui est bon à la base, mais on nous rappelle aussi qu'on n'est pas payé pour s'asseoir dessus et faire zéro rendement», a souligné M. Fortier.

Le dirigeant prenait la parole pendant une conférence organisée hier par la Chaire Ivanhoé Cambridge d'immobilier ESG-UQAM. Les participants y ont évoqué plusieurs enjeux liés au marché actuel, notamment le financement, les problèmes légaux et les bâtiments écologiques.

Jean Laurin, président de la firme Devencore NFK, a souligné que le marché des immeubles de bureaux fait l'objet d'un bouillonnement rarement vu dans les grandes villes canadiennes.

«Dans ma carrière, je n'ai jamais vu autant d'activité, que ce soit à Montréal, Toronto ou Vancouver», a-t-il souligné.