Le gouvernement Charest veut faire passer de 20 % à 30 % d'ici cinq ans la proportion de nouveaux bâtiments non résidentiels construits en bois. Cet objectif est toutefois moins ambitieux que celui qu'il s'était donné en 2008. Et pour l'atteindre, Québec veut inciter, pas obliger, les ministères et organismes publics à utiliser ce matériau.

> Sur le web: le rapport du groupe de travail sur l'utilisation du bois

Il écarte également l'idée d'accorder une subvention spéciale aux promoteurs qui choisissent le bois pour leurs projets de construction.

Le ministre des Ressources naturelles, Clément Gignac, a révélé ces quelques orientations, vendredi, en dévoilant le rapport du groupe de travail visant à favoriser une utilisation accrue du bois dans la construction. Créé il y a un an, ce groupe, présidé par le PDG de Fondaction, Léopold Beaulieu, formule 27 recommandations.

Il suggère par exemple que les ministères et organismes soient tenus d'évaluer l'utilisation du bois dans les projets publics, et ce, dès l'estimation du concept préliminaire. Ils devraient faire une «reddition de compte intégrée à leur rapport annuel» sur le recours à ce matériau. Car l'État a le «devoir» de donner l'exemple, a insisté M. Beaulieu en conférence de presse. Il ne le fait pas vraiment pour l'instant.

Le groupe a constaté que «le bois pourrait être utilisé davantage dans la majorité des bâtiments mis en chantier par les ministères et organismes». Et ce matériau est «nettement sous-utilisé» en construction institutionnelle, commerciale et industrielle. «En 2007, on estimait que la proportion de bâtiments non résidentiels mis en chantier chaque année au Québec, dont la charpente principale était en bois, ne représentait que 15 %», déplore-t-il.

Dans une stratégie dévoilée en 2008, Québec s'est fixé comme objectif de tripler cette proportion d'ici 2014. Il ratera la cible. La proportion était de 20 % en 2010. Et Clément Gignac a précisé que l'objectif du gouvernement est maintenant de 30% d'ici 2017-18. Il le confirmera dans une nouvelle stratégie qui sera dévoilée en mai.

Le ministre entend «s'inspirer» du rapport Beaulieu pour définir cette stratégie. Selon lui, le groupe de travail propose des «avenues intéressantes», en particulier la création d'une grappe industrielle pour «la filière de la construction en bois». Ce serait une façon de relancer une industrie qui traverse une crise depuis plusieurs années, a fait valoir M. Gignac. Une aide financière destinée aux promoteurs qui choisissent le bois n'est pas nécessaire à ses yeux. «On peut augmenter significativement l'utilisation du bois sans avoir une intervention gouvermentale», a-t-il dit.

En décembre 2010, le Parti québécois a déposé un projet de loi qui prévoit l'obligation d'inclure au moins 25 % de bois dans les constructions publiques, et 5% dans le cas des projets privés non résidentiels. Le gouvernement Charest l'a rejeté. Le groupe Beaulieu n'a pas retenu cette option non plus. «On ne voulait pas en faire une religion. (Le but), c'est une plus grande utilisation du bois, traité de manière plus équitable que par le passé», a expliqué M. Beaulieu.

De son côté, Clément Gignac croit «beaucoup plus à l'approche persuasive qu'à l'approche punitive». «On va retourner toutes les pierres comme nous le propose le rapport pour être sûr qu'il n'y ait pas de contraintes (à l'utilisation du bois) au niveau de la réglementation. Mais le côté obligation, je fais attention à ça», a-t-il ajouté. Il a plaidé que l'obligation voulue par le PQ pourrait contrevenir à des accords commerciaux.

Déception

Pour le critique péquiste en matière de forêts, Denis Trottier, les recommandations du rapport Beaulieu sont «très intéressantes» mais le suivi du gouvernement est pour le moment «très décevant». «Si on ne met pas une obligation» pour utiliser le bois, «on risque de passer à côté», a affirmé le député de Roberval.

Dans son rapport, le groupe de travail incite la Régie du bâtiment à poursuivre ses travaux en vue, notamment, de permettre la construction d'édifices en bois de plus de quatre étages. Il recommande que les étudiants en génie civil, option structure, doivent obligatoirement suivre un cours de base sur l'utilisation du bois. Il veut que le recours à ce matériau soit formellement reconnu dans le prochain plan d'action sur les changements climatiques comme un moyen pour réduire les émissions de gaz à effet de serre.