Des responsables du gouvernement fédéral ont été mis au parfum, au cours de l'été, du problème représenté par l'automatisation d'emplois sur le marché du travail canadien dans les prochaines années, un enjeu qui nécessitera de revoir la façon dont l'État vient en aide aux chômeurs.

Les documents préparés à l'attention de hauts responsables du ministère de l'Emploi, du Développement de la main-d'oeuvre et du Travail ne fournissent toutefois pas d'indication sur les moyens qui devraient être envisagés pour procéder à un tel changement de politiques.

On y relève qu'il est risqué de tenter de prédire le futur, notamment en matière du mouvement d'automatisation des emplois.

L'enjeu en est un d'inquiétude immédiate, soulignent plusieurs experts, point qui n'est, selon eux, pas soulevé dans les documents datant de l'été dernier. Les spécialistes interrogés par La Presse canadienne ont insisté sur la nécessité du gouvernement de faire rapidement face au problème.

«Plusieurs des tendances qui pourraient nous inquiéter quant à la technologie et à l'automatisation, sur le plan des impacts pouvant (être ressentis) chez les travailleurs, se produisent déjà et c'est cela, je crois, la pièce manquante», a fait valoir le directeur des politiques pour le Centre Mowat en gouvernance de l'Université de Toronto, Sunil Johal.

«Les gens projettent (leurs inquiétudes) selon (l'idée) que, dans 10 ans, nous pourrions faire face à une situation difficile, a-t-il poursuivi. La réalité est que plusieurs Canadiens sont déjà mal servis par les politiques gouvernementales quand on parle de formation, d'assurance emploi (et) d'une large gamme de services publics pour soutenir les Canadiens.»

L'économie canadienne pourrait perdre entre 1,5 et 7,5 millions d'emplois dans les prochaines années en raison de l'automatisation, les estimations variant en fonction de la méthodologie employée.

Les emplois qui se retrouvent les plus menacés sont ceux qui comportent des tâches répétitives tels que ceux impliqués dans une chaîne de montage. Or, des travailleurs hautement qualifiés, comme des conseillers financiers, ne seraient pas à l'abri, certains étant déjà remplacés par des programmes informatiques.

Les journalistes pourraient être de plus en plus délogés par des robots, note par ailleurs le document porté à l'attention des responsables du ministère de l'Emploi.

Une source du secteur privé bien au fait du dossier a affirmé à La Presse canadienne que les hauts responsables du gouvernement reconnaissent qu'ils doivent faire face au problème de l'automatisation, mais qu'ils croient que la création potentielle de nouveaux emplois pourrait permettre de garder les Canadiens actifs sur le marché du travail.

Le document obtenu par La Presse canadienne en vertu de la Loi sur l'accès à l'information mentionne d'ailleurs la création future de nouveaux emplois, soutenant que cette mesure répond à la façon dont l'économie fonctionne.

Si la technologue élimine des emplois, elle en crée d'autres, fait-on valoir. Le bémol est que personne ne sait si les nouveaux emplois suffiront à compenser pour les postes relayés aux oubliettes par l'automatisation ni si ceux-ci seront aussi bien rémunérés, ajoute-t-on.

Des éléments contenus dans le document ont toutefois été caviardés parce qu'ils contenaient des informations sensibles au sujet de possibles orientations de politiques futures.

Le gouvernement fédéral a signalé son intention de faire des services de formation un point d'axe du budget qui sera annoncé mercredi. Une fois que la contribution que le fédéral prévoit à ce chapitre sera connue, les négociations avec les provinces et les territoires en vue d'ententes de financement alloué au développement du marché du travail pourront être finalisées.

«Les économies et les pays ayant du succès sont ceux qui peuvent s'adapter et c'est pourquoi le développement des aptitudes est si important», a de son côté soutenu la ministre de l'Emploi, du Développement de la main d'oeuvre et du Travail, Patty Hajdu.