Le milliardaire américain Warren Buffett lâche les cordons de la Bourse: il va s'offrir pour 37,2 milliards de dollars l'équipementier aéronautique Precision Castparts, fournisseur des avionneurs Boeing et Airbus, signant ainsi sa plus grosse acquisition.

C'est le prix le plus élevé (dette comprise) que M. Buffett, un des investisseurs les plus admirés et respectés de la planète, âgé de 84 ans, ait jamais eu à payer pour acquérir une entreprise via son holding Berkshire Hathaway.

Cette opération, qui doit être finalisée au premier trimestre 2016, renforce l'intérêt de Warren Buffett pour la vieille économie et éclipse, par sa valeur, le rachat pour quelque 26 milliards de dollars en 2009 de 77,4 % de la compagnie ferroviaire Burlington Northern Sante Fe, rebaptisée BNSF Railway. Cette dernière transaction, qui était estimée à 36,7 milliards de dollars en y incluant la dette, était jusqu'ici la plus grosse prise de l'homme d'affaires.

«Ceci nous sort du marché des grosses proies pour douze mois et plus, mais nous allons continuer à acheter des petites choses dans les six prochains mois», a déclaré Warren Buffett sur la chaîne de télévision financière américaine CNBC.

Fondée en 1953, Precision Castparts, basée à Portland (Oregon, nord-ouest), fabrique des pièces détachées pour l'aéronautique, mais aussi l'énergie (conduites et tuyaux de canalisation) ainsi que des alliages métalliques. Ses plus gros clients sont le conglomérat General Electric (GE) et les avionneurs Boeing et Airbus.

Elle a réalisé, lors de son exercice 2014/15 clos fin mars, un chiffre d'affaires de plus de 10 milliards de dollars pour un bénéfice net de 1,53 milliard.

L'aéronautique représente 70 % des revenus du groupe, qui produit des pièces telles que boulons, écrous, attaches et tubes et comptait déjà Berkshire Hathaway comme actionnaire avec une participation de 3 %.

À Wall Street, la transaction était saluée puisque le titre bondissait de plus de 19 % vers 11 h lundi. Il avait perdu environ 20 % depuis le début de l'année, Precision souffrant indirectement du plongeon des prix du pétrole qui affecte ses clients du secteur énergétique.

Profiter du boom des avions civils

M. Buffett fait le pari que la demande des avions de ligne, dopée par le renouvellement et la modernisation de flottes des compagnies aériennes sur fond de prix bas du pétrole, va rester forte et pérenne.

Le trafic aérien devrait croître de 4 à 5 % par an lors des vingt prochaines années, selon les estimations de la banque Sterne Agee.

Boeing et Airbus ont des carnets de commandes garnis leur garantissant des années de production ininterrompue et ont même augmenté récemment le rythme de production dans leurs usines.

«Precision Castparts profite des fortes barrières à l'entrée sur son segment», explique l'analyste Peter Arment chez Sterne Agee.

Ce positionnement lui assure de longs contrats, selon M. Arment, parce que sa maîtrise des alliages de nickel et titane, utilisés dans les disques-aubes des compresseurs de réacteurs d'avion, est appréciée.

Precision est «le fournisseur de choix de l'industrie mondiale de l'aéronautique, l'un des secteurs des États-Unis qui exportent le plus», souligne d'ailleurs Warren Buffet, qui a acquis ces dix dernières années de nombreuses entreprises dans le secteur industriel.

Il a mis la main sur l'équipementier Marmon Holdings, le fabricant israélien d'outillage Iscar et le groupe de chimie Lubrizol.

Son holding détient plus de 80 participations, avec un portefeuille d'actifs allant des assurances (Geico) à la restauration (Dairy Queen), en passant par des participations dans des marques devenues populaires comme Coca-Cola, IBM ou encore la banque californienne Wells Fargo.

Warren Buffett avait lui-même souligné en février que ses activités allaient «des sucettes aux avions».

Le milliardaire qui souhaite que son entreprise conserve un matelas de sécurité de 20 milliards de dollars va puiser dans le trésor de guerre de 66,59 milliards de dollars de Berkshire Hathaway pour financer l'acquisition de Precision Castparts.

Le holding a enregistré une baisse de 37 % de son bénéfice net au deuxième trimestre, selon ses résultats présentés vendredi dernier, en raison d'une baisse de la valeur de ses investissements et de pertes dans le secteur de l'assurance.