L'exercice est largement théorique mais permet au président des États-Unis d'afficher ses priorités: Barack Obama dévoile lundi son budget caractérisé par une large réforme fiscale et une hausse sensible des dépenses fédérales pour les infrastructures, la recherche ou encore l'armée.

Programme politique autant qu'exercice comptable, cet épais document qui sera remis lundi à l'aube au Congrès selon un rituel bien établi, devrait se heurter à l'opposition des élus des deux chambres, désormais aux mains des républicains.

Mais en mettant en avant sa «middle class economics» (politique économique en faveur de la classe moyenne), M. Obama, qui devait détailler ses propositions lundi en milieu de journée, cherche aussi à placer ses adversaires sur la défensive à l'approche de l'élection présidentielle de 2016 où Hillary Clinton espère lui succéder et garder la Maison-Blanche aux mains des démocrates.

Selon un haut responsable de la Maison-Blanche, ce budget «placerait les familles de classe moyenne et notre économie au coeur des débats, tout en continuant à progresser sur le front de la discipline fiscale» «Vous n'avez pas à choisir entre les deux», a-t-il fait valoir, «vous pouvez faire les deux».

Pour l'exercice 2016, le déficit budgétaire se maintiendrait sous la barre des 3% du PIB. Il s'élèverait à 474 milliards de dollars, soit 2,5%. La dette fédérale représenterait 75% du PIB.

«Nous pouvons nous permettre de faire ces investissements», a lancé le président américain ce weekend dans son allocution hebdomadaire, mettant en avant la réduction des déficits, le retour de la croissance et des créations d'emploi «à leur rythme le plus élevé depuis les années 90».

Pour 2015, l'exécutif américain table sur une croissance de 3,1%.

M. Obama propose en particulier un plan d'investissement de six ans dans les infrastructures (routes, ponts, etc..) d'un montant de 478 milliards de dollars. Cet effort serait financé en partie par un impôt sur les bénéfices amassés à l'étranger par les groupes américains. Prélevé une seule fois, avec un taux de 14%, il rapporterait quelque 238 milliards de dollars, selon les calculs de la Maison-Blanche.

Selon les textes en vigueur, ces bénéfices réalisés à l'étranger ne sont imposés au niveau fédéral que lorsqu'ils sont rapatriés aux États-Unis, ce qui pousse de nombreux groupes à les garder hors des frontières américaines.

Fin des «coupes arbitraires»

Parmi ses propositions fiscales, l'exécutif, qui veut augmenter la pression fiscale sur les foyers les plus aisés, propose de faire passer de 23,8% à 28% le taux maximal de taxation des revenus du capital et des dividendes. Il suggère aussi la suppression d'une niche qui permet de ne payer aucun ou peu d'impôt sur les plus-values réalisées à partir d'actifs hérités.

M. Obama propose par ailleurs de mettre fin aux coupes budgétaires automatiques, effectives depuis 2013, en augmentant les dépenses de 74 milliards de dollars - dont la moitié pour les dépenses militaires - par rapport aux limites autorisées par les élus.

«Si le Congrès rejette ma proposition et refuse de revenir en arrière sur ces coupes arbitraires, il mettra en danger notre économie et notre armée», a-t-il mis en garde dans une tribune publiée dans le Huffington Post.

Pour l'exercice budgétaire 2016 (qui commence le 1er octobre 2015), il propose en particulier de porter à 585 milliards de dollars les dépenses militaires, soit une hausse de 38 milliards par rapport à l'année précédente. Sur ce total, 50,9 milliards seraient consacrés à l'Afghanistan et aux opérations militaires en cours contre le groupe Etat islamique en Irak et en Syrie.

Le budget prévoit aussi d'accorder 1 milliard de dollars d'aide supplémentaire à l'Amérique centrale, en particulier le Salvador, le Honduras et le Guatemala. Ces fonds sont destinés en particulier à renforcer la sécurité, à améliorer les conditions de vie et à endiguer l'émigration clandestine.

Si nombre de républicains ont d'ores et déjà dénoncé les propositions présidentielles, un compromis semble cependant envisageable sur quelques-unes d'entre elles.

«Nous voulons travailler avec cette administration pour voir si nous pouvons trouver un terrain d'entente sur certains aspects de la réforme fiscale», a déclaré sur NBC Paul Ryan, influent élu républicain à la Chambre des représentants.