Fausse manoeuvre d'un courtier ou effets pervers de marchés de plus en plus informatisés? Sous le choc, les États-Unis cherchaient à comprendre vendredi les raisons du plongeon bref, mais extrêmement violent, de Wall Street la veille.

En quelques minutes jeudi, vers 14h45, le Dow Jones est passé d'une perte d'environ 200 points à 998,50 points, plus de 9%, du jamais vu sur la place new-yorkaise. L'indice vedette s'est ensuite repris pour finir en recul de 3,20%.

Le président Barack Obama a assuré vendredi qu'une enquête était en cours pour expliquer une «activité boursière inhabituelle», et promis de protéger les investisseurs, comme l'avait déjà fait la veille au soir la SEC, l'autorité de régulation boursière.

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Le président a souligné que les régulateurs s'attacheraient à «protéger les investisseurs et faire en sorte que cela ne se reproduise pas». «Ils rendront leurs conclusions publiques ainsi que leurs recommandations sur la voie à suivre», a-t-il ajouté.

Preuve d'un dysfonctionnement du marché, selon les opérateurs, certaines actions comme celle du groupe de services informatiques Accenture ou du brasseur Boston Beer se sont échangées brièvement à près de zéro.

«Nous ne pouvons pas accepter qu'une erreur technique effraie les marchés et cause un mouvement de panique. C'est inacceptable», a jugé le représentant démocrate Paul Kanjorski. La commission des Services financiers de la Chambre des représentants va tenir une audition sur la question mardi.

Peu après le décrochage, les chaînes financières américaines ont fait état de rumeurs désignant une possible erreur humaine commise par un courtier de la banque Citigroup lors d'une transaction.

Un porte-parole de Citigroup a affirmé que ces rumeurs étaient «infondées», jugeant «problématiques» qu'elle se soient «propagées si loin».

Mais très vite, le débat s'est porté vers la structure même des marchés, où la majorité des transactions sont effectuées par des ordinateurs surpuissants, à des intervalles de l'ordre de la milliseconde, à l'aide de programmes très complexes.

«Est-ce qu'il y a eu une erreur dans une transaction? Cela arrive régulièrement sur le marché, et si cela est arrivé au mauvais moment, cela a pu déclencher la panique», déclare à l'AFP James Angel, professeur de finance à l'Université de Georgetown.

Mais «ce qu'on a vu, c'est un bon vieux mouvement de panique à l'heure d'internet», ajoute-t-il.

«Il va falloir attendre une autopsie complète», juge un blogueur financier du Wall Street Journal, Evan Newmark. «Mais il ne me semble pas trop risqué d'avancer qu'après (une éventuelle) erreur de courtier, les ordinateurs de courtage à grande vitesse, dont les algorithmes tournent sans cesse, ont pris le dessus».

Au vu de la panique qui s'est emparée du marché, le NYSE-Euronext, opérateur de la Bourse de New York, a pris la décision jeudi après-midi de suspendre la cotation de certains titres pendant des périodes allant de 30 à 90 secondes.

«Cela signifie qu'on a retiré une grande partie de la capacité du marché, au moment où tout le monde voulait vendre, explique James Angel. Les ordres de ventes sont allés ailleurs et les prix ont baissé encore plus vite.»

Autrement dit, ils sont allés sur les plateformes électroniques, comme le Nasdaq, dont le patron a critiqué l'attitude de son concurrent.

En suspendant brièvement ces titres, le NYSE «leur a, en gros, tourné le dos», a déclaré Robert Greifeld sur la chaîne CNBC. «Il y a un marché en pleine turbulence, la place principale ne répond pas, quel signal pensez-vous que cela lance aux investisseurs?» s'est-il insurgé.

Le patron du NYSE, Duncan Niederauer, a défendu «un modèle en place depuis des années». «Personne n'abandonne ses obligations», a-t-il assuré.