La publication mercredi de chiffres très décevants pour l'emploi aux États-Unis a relancé le débat quant à la solidité de la reprise de l'économie et des embauches, avant la publication des statistiques officielles du chômage vendredi. D'après l'enquête mensuelle du cabinet en ressources humaines ADP, le secteur privé de la première économie mondiale a continué à supprimer des emplois en mars, comme il le fait maintenant depuis plus de deux ans.

Les 23 000 postes détruits sont une «déception», a souligné Ryan Sweet, de Moody's Economy.com. Les analystes tablaient au contraire sur 40 000 créations d'emplois.

L'enquête d'ADP paraît traditionnellement deux jours avant les statistiques du département du Travail. Et même si les chiffres peuvent différer assez largement entre ces deux mesures de l'emploi, la tendance est généralement la même.

L'expression de «reprise sans emploi» est revenue aux esprits, dans un pays où la consommation est repartie sur des bases assez satisfaisantes, et où l'industrie participe au regain des échanges mondiaux.

«S'il y a une conclusion à tirer des chiffres d'ADP, elle est que les employeurs pourraient être toujours prudents dans leurs embauches», a résumé l'économiste indépendant Joel Naroff.

Le secteur des services a rassuré, en créant des emplois pour le deuxième mois consécutif (28 000). Or, les créations d'emplois de février (24 000) avaient été les premières dans le tertiaire depuis janvier 2008. En revanche l'industrie a encore perdu un grand nombre de postes (51 000), pour le 36e mois consécutif d'après ADP.

Avec l'incorporation des emplois publics dans les statistiques du département du Travail, les économistes parient toujours sur des créations d'emplois en mars, après les 36 000 destructions de postes de février.

Thomas Julien, de Natixis, a relevé «l'effet du recensement, qui devrait soutenir provisoirement la création d'emplois dans les mois à venir».

Les États-Unis se sont lancés à la mi-mars dans un recensement décennal qui suppose l'embauche de «centaines de milliers» de personnes à temps partiel d'ici à l'été, d'après l'administration qui en est chargée.

«Les chiffres d'ADP soulignent à quel point le marché du travail repose sur le soutien de l'État. Des progrès dans l'emploi arriveront, mais lentement et dans la difficulté cette année», a prévenu M. Sweet.

Le taux de chômage, à 9,7% en février, se maintient depuis un an à des niveaux qui n'avaient plus été vus depuis la récession du début des années 80.

Un autre indicateur de l'emploi publié mercredi, issu d'une enquête auprès des directeurs d'achats de la région de Chicago (Nord), n'a pas rassuré non plus. Quelque 21% d'entre eux ont évoqué une hausse de leurs effectifs en mars, contre 23% en février, et 17% une baisse (inchangé par rapport à février).

«Après la fin du recensement cet été, il faudra que l'embauche s'accélère dans le secteur privé, sinon la reprise sera en danger», a estimé Ryan Sweet.