Sans surprise aucune, mais encore sur division, le Comité de politique monétaire de la Réserve fédérale américaine (Fed) a reconduit la fourchette de 0,0% à 0,25% de négociation de son taux directeur.

Les autorités monétaires répètent qu'elles anticipent toujours que «les conditions économiques, qui incluent le faible taux d'utilisation des ressources, les modestes tendances inflationnistes et la stabilité des attentes inflationnistes, concourront sans doute au maintien des taux fédéraux exceptionnellement faibles pour une période étendue».

Plusieurs intervenants s'attendaient à ce que cette phrase de plus en plus discutée soit modifiée.

«Pas de nouvelle, bonne nouvelle pour les colombes», résume Jennifer Lee, vice-présidente et économiste principale chez BMO marchés des capitaux.

Le président de la Réserve fédérale de Kansas City, Thomas Hoenig, qui s'était opposé à cette politique en janvier, a réitéré sa dissidence hier. Fait rare dans un communiqué de la Fed, on y précise que M. Hoenig juge que le maintien de cette fourchette de négociation n'est plus pertinent «parce qu'elle pourrait mener à la création de déséquilibres financiers et mettre à risque à long terme la stabilité financière et macroéconomique». La fourchette est en place depuis décembre 2008.

«Cela suggère que nous pourrions assister à un changement de cap graduel à la prochaine réunion le 28 avril», supposent Derek Holt et Karen Cordes, économistes chez Scotia Capitaux. Cela donne à penser aussi que de vifs échanges ont lieu au Comité de politique monétaire.

La Fed a d'ailleurs réaffirmé sa volonté de ne pas étendre ses mesures d'allégement quantitatif, à mesure qu'elles viennent à échéance.

Le communiqué, qui est en substance une copie conforme de celui de janvier, a été accueilli sans enthousiasme par les investisseurs. Après une petite poussée à la hausse, les indices new-yorkais sont vite retournés à leur niveau des minutes précédant l'annonce.

Ce n'est qu'une heure après qu'ils se sont mis lentement à remonter.

Le maître indice new-yorkais S&P 500, qui avait gagné quelques points jusqu'à la mi-séance, a terminé la séance avec un gain de 0,78%, à 1159,46 points, un sommet de 18 mois. En matinée, l'agence de notation Standard&Poors avait mis fin à la surveillance avec perspective négative de la note «BBB» de la dette grecque. Cette mise sous surveillance avait créé un vif émoi le mois dernier.

Le statu quo de la Fed était anticipé par les observateurs, ce qui explique que notre monnaie avait poursuivi son envol vers la parité contre le billet vert. Au finish, il cotait 98,62 cents US, en hausse de 55 centièmes.

Lundi, le ministre des Finances, Jim Flaherty, avait déclaré que le Canada demeurait concurrentiel, même avec la force actuelle de notre monnaie. Comme pour lui donner raison, Statistique Canada dévoilait hier que les ventes des manufacturiers avaient bondi de 2,4% en janvier, tandis que la productivité des entreprises canadiennes avait finalement bondi de 5,5% en rythme annualisé au quatrième trimestre.

En faisant son diagnostic de l'économie américaine, la Fed a salué «la hausse significative des dépenses des entreprises en équipement et logiciel» et, dans une moindre mesure «la stabilisation du marché du travail», toujours marqué toutefois par «un chômage élevé».

Contrairement à janvier, les autorités s'inquiètent cette fois-ci que «les mises en chantier stagnent à des niveaux déprimés». En février, elles se sont élevées à 575 000 et étaient à la baisse de 5,9%, alors que les permis de bâtir ont aussi diminué. Au début de 2006, au sommet de la bulle, les coulées de fondation atteignaient 2,3 millions de logements.

«Le communiqué de la Fed reste imprégné des incertitudes qui menacent l'économie américaine, analyse Francis Généreux, économiste principal chez Desjardins. Dans ces circonstances, il semble clair qu'un mouvement des taux directeurs n'est pas pour bientôt.»