Ralentie par la trêve de fin d'année, l'enquête sur l'escroquerie Madoff n'a toujours pas mis à jour de complicités, notamment familiales, tandis que Noël a été marqué par le suicide à New York d'un financier français piégé par la fraude, Thierry de la Villehuchet.

Citant des sources proches de l'instruction, le Wall Street Journal rapporte vendredi que Mark et Andrew Madoff, les deux fils de l'homme d'affaires arrêté le 11 décembre dernier et accusé d'avoir orchestré pendant des décennies une fraude «pyramidale» mondiale portant sur 50 milliards de dollars, continuent à affirmer qu'ils n'étaient au courant de rien.

D'autres membres de la famille, notamment le frère de Bernard Madoff, Peter, et une nièce mariée à un ancien employé de la SEC, le gendarme boursier américain, disent également avoir appris le scandale de la bouche du financier la veille de son arrestation le 11 décembre dernier. Ce sont d'ailleurs les deux fils qui ont décidé d'alerter la justice.

Tous ces proches étaient associés dans une autre entreprise de Bernard Madoff employant 120 salariés et s'occupant de courtage, située dans le même immeuble sur la 3ème avenue à Manhattan mais à des étages différents.

Le liquidateur de la société de courtage, Irving Picard, a chargé la banque Lazard de la vente, alors que de nouvelles plaintes touchant à l'affaire sont déposées devant les tribunaux.

Ainsi l'Université de New York s'est pourvue en justice la veille de Noël contre Ezra Merkin, un investisseur à qui elle avait confié 94 millions de dollars. L'Université accuse le gestionnaire de n'avoir pas suffisamment vérifié la fiabilité des fonds où l'argent avait été placé.

Selon le WSJ, les juges ont enjoint M. Merkin «de ne pas détruire de documents relatifs à l'affaire Madoff», le fonds Ariel qu'il gérait ayant été très exposé à la fraude.

L'affaire a déjà provoqué un drame, le suicide avant Noël du co-fondateur du gestionnaire de fonds Access International, exposé à hauteur de 1,3 milliard de dollars. Thierry de la Villehuchet, 65 ans, s'est ouvert les veines dans son bureau de Madison Avenue sans laisser de lettre mardi matin.

Le petit cabinet qui auditait les comptes de Bernard Madoff fait l'objet d'une enquête, et une autre est également en cours au sein de la SEC, alertée depuis longtemps sur des irrégularités possibles et accusée de n'avoir pratiquement pas réagi, renonçant à poursuivre.

Mais pour l'instant, le seul accusé dans cette affaire qui a fait des dizaines de victimes parmi ceux qui lui avaient confié directement ou indirectement leurs avoirs, des banques prestigieuses, des fortunes privées ou des associations, reste Bernard Madoff, 70 ans.

Cet ancien président du conseil d'administration de la bourse Nasdaq, qui est assigné à résidence et porte un bracelet électronique, fait l'objet d'une plainte civile de la SEC et d'une plainte criminelle du gouvernement américain.

Toujours en liberté sous versement d'une caution de 10 millions de dollars, une somme garantie par la valeur de son appartement de Manhattan et par plusieurs biens gagés par son épouse, il ne devrait pas comparaître avant le début du mois de janvier.

Andrew Calamari, responsable de la SEC chargé du suivi de l'affaire à New York, n'était pas joignable vendredi, et le tribunal ne prévoyait pas d'audience avant le 6 janvier au plus tôt.

Parmi les victimes de la fraude, les associations caritatives grugées suscitent particulièrement l'indignation des centaines de commentateurs qui réagissent dans les colonnes des journaux.

Ainsi, après l'annonce mercredi par la Fondation Elie Wiesel pour l'humanité qu'elle avait donné en gestion «la quasi totalité de ses avoirs» à la société de Bernard Madoff, soit 15,2 millions de dollars, pouvait-on lire dans la presse des réactions de personnes demandant une condamnation sévère et rapide, certains allant jusqu'à déplorer que la peine de mort n'existe pas pour les crimes économiques.