La tradition de sceller les mariages et les anniversaires importants en offrant un diamant finira-t-elle avec la génération des baby-boomers ? Le président et chef de la direction de Stornoway, Matt Manson, croit que non. Celui qui dirige la première mine de diamants du Québec s'est entretenu des perspectives de l'industrie avec La Presse, jeudi, après son passage à la tribune du Cercle finance et placement du Québec.

LES MILLÉNIAUX EN VEULENT-ILS ?

« C'est un mythe », dit Matt Manson à ceux qui pensent que la génération actuelle de jeunes adultes, qu'on appelle les milléniaux, n'achètera pas de diamants. Ils ne mettront peut-être jamais les pieds chez Birks ou dans une bijouterie, mais ils achèteront en ligne. Ils feront comme leurs parents, prédit-il. La différence, c'est qu'ils se marient plus tard, soit vers 30 ans plutôt qu'à l'âge moyen de 23 ans, selon des statistiques américaines. Les milléniaux aiment aussi la qualité et les expériences « vraies », selon lui. « En Chine, les jeunes femmes s'achètent elles-mêmes des diamants, qui sont pour elles un signe d'indépendance financière et de succès professionnel », a-t-il illustré.

NON AUX IMITATIONS

L'industrie du diamant a toujours eu à composer avec des imitations qui ont l'avantage de coûter beaucoup moins cher que les vraies pierres. Actuellement, l'acteur Leonardo DiCaprio fait la promotion du diamant synthétique, une pierre produite en usine qui a moins d'impact environnemental que celle extraite du sol. Ça n'inquiète pas le patron de Stornoway. D'une part, a-t-il expliqué, le diamant a toujours eu ce genre de concurrence, pensons à la mode des zircons cubiques. D'autre part, l'argument de vente du vrai diamant, soit une pierre naturelle rare qui marque les moments importants d'une vie, a toujours de la valeur, selon lui. Les mines situées dans des pays comme le Canada respectent des règles strictes en matière d'environnement, ajoute-t-il.

UNE OFFRE EN BAISSE

Plusieurs mines dans le monde sont en fin de vie et des producteurs importants cesseront leurs activités dans quelques années, comme la mine Argyle de Rio Tinto en Australie. La production des nouvelles mines ne suffira pas à remplacer cette production, a expliqué Matt Manson, ce qui aura un effet à la hausse sur le prix des pierres précieuses. La demande, par ailleurs, devrait continuer à augmenter au rythme de l'enrichissement des ménages indiens et chinois. Dans un scénario plus prudent, la demande pour les diamants suivra la courbe de la démographie et de la croissance économique, prévoit-il.

DES PROGRÈS À LA MINE

La mine Renard de Stornoway est en activité depuis juillet 2016. Au 31 décembre 2017, elle avait produit 2 millions de carats, à un coût moyen de 65 $ par carat. « Renard est la mine de diamants qui a les plus bas coûts de production au Canada », a souligné Matt Manson. La mine a connu des problèmes de bris de pierres, qui ont entraîné des prix de vente plus bas que prévu sur le marché. La dernière vente réalisée à Anvers en janvier dernier a rapporté à Stornoway un prix moyen de 104 $US par carat. « C'est le meilleur prix que nous ayons obtenu depuis le début de nos opérations », a-t-il dit. Il s'agissait toutefois du plus petit lot mis en vente par Stornoway jusqu'à maintenant.

ACHETER OU ÊTRE ACHETÉ

Le monde minier bruisse constamment de rumeurs de transactions et Stornoway n'y échappe pas. Son action se négocie à un prix très bas (elle a clôturé à 50 cents hier à la Bourse de Toronto), ce qui peut en faire la cible d'une prise de contrôle. Matt Manson le reconnaît, mais il assure qu'il n'a aucunement l'intention de vendre au rabais son entreprise. « Stornoway a aussi des actionnaires qui détiennent des intérêts importants, comme Investissement Québec et la Caisse de dépôt, qui n'ont pas l'intention non plus de vendre au rabais », a-t-il souligné. Stornoway peut aussi être du côté des acheteurs. M. Manson a reconnu qu'il avait discuté d'une transaction avec un autre producteur canadien, Dominion Diamond, qui a finalement été avalé par The Washington Companies, un acheteur aux poches plus profondes qui a accepté de payer 1,2 milliard US.

Photo fournie par Stornoway

Les deux plus gros diamants trouvés sur le site de Renard 65 par Diamants Stornoway (Canada) inc.

Photo jock fistick, archives bloomberg

L'industrie du diamant a toujours eu à composer avec des imitations qui ont l'avantage de coûter beaucoup moins cher que les vraies pierres.