Semafo, qui deviendra bientôt la plus importante société minière québécoise, s'oppose à des mesures de protection trop sévères contre les offres d'achat hostiles.

Dans le secteur minier, la question se pose plus que jamais. La société aurifère québécoise Osisko s'apprête en effet à passer aux mains des entreprises torontoises Yamana Gold et Agnico Eagle, conséquence d'une offre hostile faite par Goldcorp en janvier.

«Il faut être prudent et ne pas précipiter les choses», a estimé hier le PDG de Semafo, Benoit Desormeaux, en marge de l'assemblée des actionnaires.

Des mesures trop contraignantes risquent d'avoir des effets négatifs en bloquant des offres d'achat qui pourraient s'avérer payantes pour les investisseurs, a souligné M. Desormeaux. «Il y a des actionnaires qui peuvent investir pour la création de valeur, qui se fait aussi, à un moment donné, par acquisition. Si les règles devenaient trop strictes et que ce potentiel n'existait plus, c'est sûr que ça affecterait la valeur des compagnies cotées en Bourse.»

Modifier les lois

Après l'annonce de la transaction avec Yamana et Agnico, les dirigeants d'Osisko ont pressé les gouvernements de modifier les lois pour protéger les sièges sociaux et décourager les prises de contrôle hostiles.

L'an dernier, l'Autorité des marchés financiers (AMF) a mis de l'avant plusieurs mesures en ce sens. La principale est l'allongement, de 35 à 90 jours, du délai accordé à une entreprise pour répondre à une offre hostile. L'AMF tente actuellement de persuader d'autres provinces de l'appuyer.

En 2012, le Parti libéral avait proposé des changements législatifs pour compliquer la vie des instigateurs d'offres d'achat hostiles, mais il ne les a pas repris au cours de la dernière campagne électorale. Le parti au pouvoir a toutefois promis de permettre à Québec de consacrer jusqu'à 20% du Fonds des générations, qui contient actuellement 5,6 milliards de dollars, pour acquérir jusqu'à 10% des actions d'entreprises vulnérables.

Semafo, qui exploite une mine d'or au Burkina Faso, en Afrique, assure n'avoir jamais reçu d'offre d'achat en bonne et due forme, ni hostile ni amicale. Mais cela pourrait changer. «Nous avons un groupe de propriétés très attractif, alors c'est sûr qu'il y a des gens qui s'intéressent à Semafo», a indiqué Benoit Desormeaux.

«Le jour où ça arrivera, la meilleure défense, ce sera de convaincre les actionnaires qu'on a un meilleur plan que celui de l'entreprise qui a déposé l'offre, a-t-il ajouté. On a des actionnaires qui nous soutiennent, alors on croit qu'on serait capables d'en rassembler autour de nous s'il y avait une offre hostile.»

Les principaux actionnaires de Semafo sont la firme d'investissement new-yorkaise Van Eck (15,5% du capital), le gestionnaire de fonds torontois Sentry (8,7%), l'assureur texan USAA (4,1%) et la Caisse de dépôt et placement du Québec (3,3%). La valeur boursière de Semafo atteint 1 milliard.

Le ménage est fait

Semafo prévoit extraire au moins 200 000 onces d'or cette année (elle en avait extrait 158 000 en 2013). L'entreprise s'attend à ce que ses coûts d'exploitation diminuent sensiblement grâce à de nouveaux gisements à plus haute teneur.

L'an dernier, la baisse du cours du métal jaune a forcé Semafo à faire le ménage. L'entreprise a vendu pour 1,25 million US sa mine Samara Hill, au Niger, au gouvernement du pays. Elle a aussi fermé sa mine Kiniero, en Guinée, et l'a mise en vente. Cette rationalisation des actifs a fait passer le nombre d'employés au siège social, à Saint-Laurent, de 75 à 50 personnes.

Pour la direction de Semafo, les résultats d'exploration décevants de 2012 sont bel et bien chose du passé. «On a rebâti notre crédibilité au cours de la dernière année et demie», a soutenu M. Desormeaux. Depuis 12 mois, l'action de l'entreprise s'est appréciée de plus de 85%, reprenant une bonne partie du terrain perdu en 2012. Hier, le titre a toutefois reculé de 3,6% pour clôturer à 3,77$, à la Bourse de Toronto.