Confrontées à une hausse de leurs tarifs d'électricité, les alumineries québécoises se rebiffent. Elles réclament une réduction du coût de l'électricité et de nouveaux contrats à partage de risques pour continuer à investir dans leurs usines.

Le consortium Alouette, qui veut investir 2 milliards de dollars pour augmenter la production de son aluminerie de Sept-Îles, a entrepris de convaincre le gouvernement de réduire le coût de ses contrats d'approvisionnement à long terme conclus en 2011.

Alouette a mandaté l'avocat Gérard Coulombe, de Lavery, de Billy, pour négocier «l'amélioration des conditions tarifaires applicables aux grands utilisateurs d'électricité", afin de mener à bien son projet d'expansion, selon le Registre des lobbyistes du Québec.

Hausse des tarifs chez Hydro

L'offensive d'Alouette, appuyée par tous les autres grands consommateurs industriels du Québec, arrive alors qu'Hydro-Québec réclame une augmentation substantielle de ses tarifs pour 2013-2015.

L'industrie fait face à une augmentation de 5% du tarif L. C'est un peu moins que la hausse d'au moins 5,4% réclamée par Hydro pour l'ensemble de sa clientèle, mais c'est beaucoup trop au goût des alumineries.

Même avant de connaître l'ampleur de la hausse de cette année, les alumineries avaient commencé à souligner que le contexte énergétique mondial a changé et que le tarif L n'est plus avantageux pour la grande industrie.

À 4,2 cents le kilowatt-heure, le tarif L place les alumineries au 72e rang sur 100 dans l'industrie, explique Jean Simard, porte-parole des entreprises actives au Québec. Si la hausse de 5% est appliquée, les alumineries québécoises dégringolent au 90e rang. C'est dangereux, selon lui. «Le Québec entre dans la zone de risque qui mène au désinvestissement progressif.»

Il y a deux ans à peine, Alouette a accepté de renouveler l'approvisionnement de son usine de Sept-Îles jusqu'en 2041 et d'acheter 500 mégawatts supplémentaires pour son projet d'expansion, le tout au tarif L.

Cette entente ne peut plus fonctionner, selon Jean Simard, parce que le contexte a changé. «Partout dans le monde, la donne énergétique a changé. Il y a des alumineries qui repartent dans l'État de New York avec des tarifs de 3,5 cents le kilowattheure», précise-t-il.

Contrats à partage de risques

Devant la Commission sur les enjeux énergétiques qui commence aujourd'hui ses consultations, l'industrie de l'aluminium demandera au gouvernement de s'ajuster à ce nouveau contexte énergétique.

Elle proposera de conclure de nouveaux contrats à partage de risques pour assurer la survie à long terme des usines québécoises. Ces nouveaux contrats à long terme tiendraient compte des mêmes variables que les anciens, comme le taux de change et le prix de l'aluminium, «mais avec une équation améliorée», explique Jean Simard.

La plupart des ententes très controversées conclues dans les années 80 sont terminées ou sur le point de prendre fin. Les détails de ces ententes sont restés secrets, mais on sait qu'elles ont généré des pertes pour Hydro-Québec pendant toute leur durée.

L'industrie avait accepté que ces contrats soient remplacés par des ententes à long terme avec Hydro-Québec au tarif L. Le gouvernement avait même accepté d'exempter le tarif de l'indexation annuelle du prix du bloc patrimonial, ce qui aurait permis au tarif L d'augmenter moins vite que les autres catégories de tarifs.

Mais le contexte oblige l'industrie de l'aluminium à améliorer ces conditions, fait valoir Jean Simard.

Actuellement, la moitié des alumineries dans le monde bénéficient d'un prix de l'énergie plus bas que celui en vigueur au Québec. Si le Québec ne s'ajuste pas à ce nouvel environnement, «les projets d'expansion ne se feront pas, dit-il, et le maintien des actifs n'est pas assuré. Il y a une décision à prendre comme société.»