Avis aux passionnés de bijoux: deux joyaux miniers canadiens sont en vente. Alors que BHP Billiton tente de se départir sa mine Ekati, dans les Territoires du Nord-Ouest, au tour de Rio Tinto de remettre en question sa présence dans l'industrie du diamant, et donc sa participation majoritaire dans la mine Diavik.

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Le géant minier Rio Tinto a indiqué hier qu'il procédait à une «révision stratégique» de ses activités dans le secteur du diamant et qu'il considérait la mise en vente de ses intérêts. Ceux-ci comprennent la mine Argyle, en Australie, des participations dans les mines Zurowa, au Zimbabwe (78%), et Diavik (60%), de même que le projet avancé Bunder, en Inde.

«Les perspectives du marché du diamant sont très positives, avec la demande en forte croissance et une offre limitée par le manque de nouvelles découvertes, note pourtant le chef de la direction du groupe Diamants et minéraux de Rio Tinto, Harry Kenyon-Slaney. Nous avons des actifs de grande valeur et de haute qualité, mais étant donné la taille des activités, nous regardons si nous pouvons créer davantage de valeur avec une structure de propriété différente.»

La stratégie de Rio Tinto est de se concentrer sur des actifs «de grande taille, de longue durée de vie et propices à l'expansion», ce qui est loin d'être évident dans le cas du diamant.

Comme BHP, Rio Tinto se questionne sur sa présence dans une industrie où elle est incapable de prendre une position de force malgré la hausse des prix et de la profitabilité, explique Edward Sterck, analyste chez BMO Marchés des capitaux, dans une note aux investisseurs.

De Beers reste l'acteur dominant dans le marché très fermé des diamants. «Il faut vraiment avoir une grande présence dans la commercialisation, parce qu'il s'agit d'un marché tellement opaque en termes de prix», a affirmé récemment à l'agence Bloomberg un analyste australien de CLSA Asia-Pacific Markets.

Les diamants de Rio Tinto génèrent environ 2% des bénéfices avant impôts de la société. En septembre dernier, Citigroup a observé que les activités de diamants de BHP et Rio Tinto drainaient beaucoup d'argent. Rio Tinto a récemment inscrit une charge exceptionnelle de 344 millions US pour ses activités de diamants en raison d'une explosion des coûts à sa mine Argyle, en Australie. L'unité Diamants de Rio Tinto a enregistré une perte de 76 millions en 2011.

Qui peut acheter Diavik?

Diavik et Ekati sont les deux plus importantes mines de diamants du pays. Rio Tinto possède 60% des intérêts de la mine Diavik, dans les Territoires du Nord-Ouest, contre 40% pour le joaillier Harry Winston Diamond Company. Les réserves actuelles assurent encore de sept à dix ans de production.

D'après Edward Sterck, Harry Winston Diamond n'a pas les ressources nécessaires pour racheter la part de Rio Tinto, qui vaudrait au bas mot 700 millions US. En plus, Harry Winston n'est pas un opérateur. «Un danger pour Harry Winston est que Rio vende sa part à un partenaire plus faible et techniquement moins solide», note Edward Sterck. Le titre de Harry Winston (HW à Toronto) a perdu 4,8% hier, à 14,85$.

Anglo American, qui possède maintenant 85% de De Beers après avoir acheté la part de 40% de la famille Oppenheimer, serait un acheteur logique, a noté un analyste torontois préférant ne pas être nommé.

Seth Petersen, de la banque allemande Berenberg, est moins convaincu par l'option de la vente. «Je ne pense pas qu'il y ait dans l'industrie un acheteur réaliste pour les mines de Rio Tinto», a-t-il indiqué à La Presse Affaires. Selon lui, Rio Tinto pourrait inscrire en Bourse une société détachée (spinoff), ce qui lui permettrait de se défaire de toutes ses mines d'un seul coup.

Des fonds d'investissement privés pourraient également se montrer intéressés. Des informations rapportées par Bloomberg, basées sur des sources confidentielles, laissent croire que les firmes américaines KKR et Apollo Global Management seraient dans la course pour acheter la participation de 80% de BHP dans la mine Ekati.

Des analystes ont également évoqué hier la possibilité que les actifs de BHP et Rio Tinto soient rassemblés pour créer une nouvelle entité détachée ou pour être vendus ensemble. Seulement 20 kilomètres séparent les mines Ekati et Diavik.

Bank of America a estimé la valeur des mines de Rio Tinto à près de 2,6 milliards. Ekati pourrait être vendue à un prix de 500 à 700 millions. BHP a déjà spécifié qu'en l'absence d'acheteurs, elle allait continuer d'exploiter Ekati jusqu'à la fin de sa vie utile, en 2019.

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EN CHIFFRES 

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MINES CANADIENNES EN ACTIVITÉS

2,5 MILLIARDS

EN 2011, VALEUR DE LA PRODUCTION DU CANADA, TROISIÈME PRODUCTEUR MONDIAL

9,9 MILLIONS DE CARATS

PRODUCTION CANADIENNE EN 2011

Source : Ressources naturelles Canada, données préliminaires