Cherchant à diversifier ses sources de revenus pour contrer le déclin des ventes de papier de bureau en Amérique du Nord, Domtar (T.UFS) s'implantera en Chine au début de l'an prochain.
L'entreprise montréalaise a annoncé mercredi qu'elle lancera des activités de distribution de papier dans la province méridionale de Guangdong, la plus peuplée de l'Empire du milieu.
Domtar achètera en grande quantité du papier fabriqué par des entreprises chinoises, le préparera pour la commercialisation (en le transférant sur de petits rouleaux ou en le coupant en feuilles) et le vendra à des clients locaux. C'est dans le Guangdong que se trouve la plus grande concentration d'imprimeurs commerciaux en Chine.
En faisant cette première incursion sérieuse dans le pays, Domtar veut tester ce marché en pleine croissance dans l'espoir d'y fabriquer un jour du papier.
«C'est une façon sensée d'apprivoiser ce qui est aujourd'hui le plus grand marché du monde pour le papier, sans engager trop de capitaux», a expliqué mercredi le président et chef de la direction de Domtar, John Williams, au cours d'une conférence de presse qui a suivi l'assemblée annuelle des actionnaires.
L'entreprise consacrera environ 35 millions $ US à cette aventure dont elle espère tirer des revenus annuels oscillant entre 150 et 200 millions $ US. D'ici quelques années, la papetière pourrait employer jusqu'à 400 personnes en Chine.
Domtar vend déjà pour près de 700 millions $ US par année de pâte en Chine, mais pas de papier.
Les expéditions de papier de Domtar, concentrées en Amérique du Nord, ont reculé de quatre pour cent en 2010. Compte tenu de la hausse des prix, ces ventes ont toutefois produit des revenus comparables à ceux enregistrés en 2009.
Les analystes prévoient que la demande de papier continuera de fléchir au cours des prochaines années en raison de la popularité sans cesse grandissante des moyens de diffusion électroniques.
Usines canadiennes
M. Williams a toutefois assuré que les travailleurs des quatre usines canadiennes de Domtar - dont celle de Windsor, dans les Cantons-de-l'Est - n'avaient pas à craindre de licenciements à moyen terme.
«Nous avons un plan qui prévoit ce que nous ferons si la demande chute, a indiqué M. Williams. (...) S'il faut réduire la capacité, il est toujours possible de fabriquer, avec la pâte, un autre produit à valeur ajoutée.»
Le PDG a donné l'exemple de la construction, en partenariat avec l'entreprise FPInnovations, d'une usine de démonstration de nanocellulose cristalline (NCC) à Windsor - une première mondiale. La NCC est un matériau résistant à base de fibre de bois qui pourrait entrer dans la fabrication d'avions, d'appareils médicaux, d'automobiles et de cosmétiques, entre autres.
«Ce produit est actuellement fabriqué en très faible quantité, a relaté John Williams. Or, à la fin de cette année ou au début de l'an prochain, nous pourrons en fabriquer une tonne par jour!»
Domtar met à l'essai d'autres innovations, en plus d'envisager une entrée sur le marché des papiers tissu. Bien sûr, rien ne garantit que ces initiatives seront couronnées de succès.
«Il faut embrasser quelques grenouilles avant qu'un prince n'apparaisse!» a illustré M. Williams.
Dividende
L'entreprise a par ailleurs fait état mercredi d'une hausse de 40% de son dividende trimestriel, qui passera de 25 à 35 cents par action. Elle bonifiera également son programme de rachat d'actions, dont l'enveloppe atteindra désormais 600 millions $ US, contre 150 millions $ US jusqu'ici.
«Nous remettrons la plus grande partie de nos liquidités à nos actionnaires si nous ne trouvons rien de mieux à faire avec celles-ci», a affirmé M. Williams, en promettant de faire preuve de circonspection quant à d'éventuelles acquisitions.
«Cette industrie, malheureusement, a la réputation d'acheter (des actifs) à un prix élevé et de les revendre à bas prix, alors nous devons être prudents pour ne pas tomber dans ce piège», a-t-il illustré.
En 2010, Domtar a multiplié par dix ses profits hors éléments exceptionnels. Quant aux flux de trésorerie, ils ont dépassé la marque du milliard de dollars US - un record.
L'entreprise a ainsi pu réduire sa dette de plus de 900 millions $ US, racheter pour 114 millions $ US de ses actions et instaurer un dividende. Domtar calcule que le rendement total de ses actions a atteint 42% en 2010, soit bien davantage que ses concurrents.
Plus important fabricant nord-américain de papier fin, Domtar emploie quelque 8500 personnes au Canada, aux États-Unis et outre-mer.
En fin d'après-midi, mercredi, l'action de Domtar s'échangeait à 90,14 $, en hausse de 0,8%, à la Bourse de Toronto. En deux ans, le titre a progressé de plus de 450%