Le prix du cuivre échangé sur la Bourse des métaux londonienne (LME) a atteint jeudi pour la première fois le seuil des 10 000$ US la tonne, un record historique, sur un marché où l'offre de métal rouge peine à répondre à une consommation mondiale robuste.

Le cours de la tonne cuivre pour livraison dans trois mois s'est hissé ce matin au seuil de 10 000$ US, avant de céder du terrain.

Aidé par un affaiblissement de la monnaie américaine, le marché «a été poussé dans la dernière ligne droite par un net optimisme sur la reprise économique mondiale, en particulier après les indices manufacturiers publiés mardi», relève Filip Petersson, analyste de la banque SEB.

L'activité dans l'industrie s'est en effet accélérée en zone euro en janvier, elle a continué - bien qu'à un rythme ralenti - de progresser en Chine, premier consommateur de cuivre dans le monde, et elle a atteint aux États-Unis son plus haut niveau depuis mai 2004.

Des chiffres qui augurent d'une demande mondiale de cuivre robuste: celle-ci pourrait progresser de 5,2% en 2011 et de 4,2% en 2012, selon de récentes estimations de la Commission chilienne du cuivre (Cochilco).

Mais en face, la production semble à la peine. «Les perspectives sont fort médiocres, avec peu de nouveaux projets miniers», souligne M. Petersson.

Sur les dix premiers mois de 2010, la production minière est restée presque inchangée alors que la consommation mondiale s'envolait de 7,5%, selon le Groupe international d'étude du cuivre (ICSG), qui évalue à 400 000 tonnes le déficit de production apparu sur le marché.

Selon JPMorgan, ce déficit pourrait se creuser jusqu'à 600 000 tonnes cette année, ce qui pousserait le prix moyen de la tonne de métal rouge à 10 250$ US en 2011 et 11 500$ US en 2012.

Le cyclone Yasi, qui a frappé mercredi le nord-est de l'Australie, «a encore accru la pression sur les prix», le géant minier Xstrata ayant évacué le plus grand complexe d'exploitation de cuivre du pays, notait de son côté Ian O'Sullivan, analyste de la société financière Spread Co.

Selon lui, «la hausse pourrait s'accélérer la semaine prochaine, une fois que les acheteurs chinois seront revenus des congés du Nouvel an lunaire».

Cependant, «une partie de la demande de cuivre pourrait s'éroder au cours de l'année face à la montée des prix et aux conséquences d'un resserrement des politiques monétaires (des pays consommateurs)», avertissait Deutsche Bank.

«La grande inconnue concerne la demande industrielle chinoise, qui pourrait être freinée par les efforts déjà entrepris par les autorités pour juguler l'inflation» et éviter la surchauffe économique du pays, confirmait Edward Meir, de MF Global.

Par ailleurs, «l'offre à court terme est abondante, avec une hausse sensible des stocks de cuivre du LME et du marché shanghaïen, ce qui laisse penser que l'envolée actuelle pourrait se révéler instable», prévenait-il.

Alors qu'ils avaient enregistré une décrue majeure en 2010, les réserves du LME ont inversé la tendance, augmentant de près de 5% en janvier.

Le négociant unique et non identifié qui contrôlait fin décembre entre 80 et 90% des stocks de cuivre conservés dans les entrepôts de la Bourse londonienne a visiblement abandonné ses positions: aucun opérateur ne possède plus de 40% des stocks, selon les statistiques de l'institution.

Selon le Wall Street Journal, cet acteur dominant était la banque JPMorgan, qui prévoit de lancer cette année aux États-Unis un fonds (ETF) coté en Bourse et adossé à des stocks physiques de cuivre - un instrument inédit qui pourrait doper les investissements spéculatifs sur le métal rouge.