Comment des actifs générés dans des écoles primaires et des polyvalentes de Montréal se retrouvent-ils dans les mains de financiers de Bay Street? Et pourquoi certaines des plus grandes banques du pays allongent-elles des millions de dollars pour acquérir ces produits financiers? La Presse Affaires vous entraîne dans les coulisses de la nouvelle économie du carbone.

René George Clermont choisit l'onglet «St-Clément Ouest» parmi la liste d'écoles qui défile devant lui. Sur son écran d'ordinateur apparaissent aussitôt les trois chaudières au gaz naturel qui chauffent cette petite école primaire de Ville Mont-Royal.Par ce lundi du début du mois de mai, les chaudières sont complètement arrêtées, indique le logiciel de M. Clermont. «La température est parfaite. La qualité de l'air aussi», observe-t-il.

M. Clermont est régisseur à la Commission scolaire Marguerite-Bourgeoys (CSMB). De son bureau situé à Ville-Saint-Laurent, il peut contrôler d'un clic de souris la température de la majorité des 114 bâtiments dont il a la responsabilité.

Mais M. Clermont fait beaucoup plus que veiller au confort des élèves de sa commission scolaire. Ce faisant, il provoque toute une série d'événements qui intéressent au plus au point les financiers de Toronto et les dirigeants de certaines des plus grandes banques du pays.

Pourquoi? Parce que depuis décembre dernier, la Commission scolaire Marguerite-Bourgeoys génère officiellement des crédits de carbone. Et des crédits de carbone, même en l'absence de lois canadiennes sur les gaz à effet de serre, ça se transige et ça se vend.

L'affaire n'est pas que théorique. Des crédits, la commission scolaire en a déjà vendus.

«Au bas mot, et de façon très conservatrice, je calcule que d'ici 2015, on va aller chercher 350 000$ avec ça», dit André Dufresne, directeur adjoint, entretien et ingénierie, à la CSMB.

Les contrats sont d'ailleurs déjà signés. Tous les crédits générés par la Commission scolaire Marguerite-Bourgeoys seront achetés par la firme québécoise Solutions L2i à un prix déjà fixé. L2i les revendra ensuite à Greening Canada Fund, un fonds «vert» géré par de vieux routiers de Bay Street.

Ces actifs finiront finalement dans les poches de la Banque de Montréal et de la Banque TD, qui ont conjointement investi 13 millions de dollars pour acheter les crédits de la CSMB et d'autres similaires.

Pourquoi? Comment ça marche? Et de quelle façon chacun des acteurs de cette nouvelle économie trouve-t-il son compte dans cette affaire? La Presse Affaires fait le point.