La Presse donne la parole aux grands dirigeants du Québec. Tous les vendredis, un patron répond à cinq questions posées par le chef d'entreprise interviewé la semaine précédente. Et ainsi de suite.

Votre mission est de protéger la personne contre les risques liés à l'usage de la route. En 2016, quels sont vos plus grands enjeux à cet égard ?

Le bilan routier s'améliore depuis huit ans, sauf en 2015, où il s'est légèrement détérioré. Pour nous, le défi est de taille, parce que les gains seront de plus en plus difficiles à faire. Au Québec, on a déjà connu 2000 décès sur nos routes, alors qu'en 2014-2015, on était sous la barre des 400.

Les gens font plus de vélo, marchent plus. Les nouvelles technologies rendent nos véhicules plus sécuritaires, mais on a plus de sources de distraction. La vie va plus vite, aussi. Quand j'additionne ces facteurs, j'ai tous les ingrédients pour augmenter les risques d'accident. On doit trouver quoi faire de plus et innover pour éliminer les accidents.

Au-delà de la sécurité routière, quels sont les enjeux financiers, opérationnels et d'efficacité auxquels la SAAQ fait face ?

Ces enjeux sont liés par un objectif : continuellement améliorer les services offerts aux clients. On a mis beaucoup d'efforts pour améliorer les services aux accidentés de la route. Dans les cinq prochaines années, c'est l'amélioration de nos services en permis et immatriculations qui sera notre priorité. On veut répondre de mieux en mieux aux attentes de nos clients.

Dans le service public, la satisfaction est reliée à l'expérience client, mais aussi au prix qu'on demande pour les services offerts. La capacité de payer des citoyens est pas mal au maximum. Notre solution : innover pour changer notre approche en matière de sensibilisation et cibler davantage les problématiques. Par exemple, on vient de lancer une campagne contre l'alcool au volant au Saguenay-Lac-Saint-Jean, où il y a plus de décès liés à l'alcool qu'ailleurs. On s'est associés aux Saguenéens de Chicoutimi pour faire porter le message.

Le bilan routier de 2015 faisait état d'une hausse de 12,1 % des morts sur la route, après plusieurs années à la baisse. Quelles sont les stratégies que la SAAQ a mises en place en réponse à cette hausse, et comment s'annonce le bilan de 2016 ?

On avait une stratégie sur deux axes. D'abord, la prévention, comme je l'expliquais. L'autre axe a été de montrer aux citoyens qu'il y a un lien direct entre leur comportement sur la route et la prime d'assurance qu'on leur demande. On a d'ailleurs été capables de diminuer les contributions d'assurances en 2015 de façon significative. Plus de 1 milliard sur trois ans est retourné à nos clients sous forme de baisse des primes d'assurance sur leurs permis de conduire et d'immatriculation.

Jusqu'à maintenant, le bilan de 2016 est fragile. Les six premiers mois m'inquiétaient. On a travaillé nos stratégies avec les corps policiers pour arrimer nos messages, et ça fonctionne. On restera sous la barre des 400 décès, et ça devrait ressembler à l'année dernière.

En quoi la gestion d'un organisme gouvernemental comme la SAAQ est-elle différente de la gestion d'une entreprise privée ?

Comme au privé, la satisfaction des clients est notre priorité. En tant que monopole, c'est un double défi. La force de notre entreprise réside aussi dans la compétence et la mobilisation des employés. Je dirais que la grande différence, c'est qu'il y a plus de parties prenantes qu'au privé. Il y a plus de « fils à attacher », plus d'impératifs à prendre en compte dans les décisions, ce qui fait que la gestion est plus complexe.

Vous travaillez au sein de la SAAQ depuis 1995. Selon vous, quelles ont été les plus belles réussites de l'organisme au fil des ans et quels défis vous attendent dans les prochaines années ?

Je suis à la haute direction depuis 2005. En dix ans, il y a quatre grands éléments de fierté pour nous. On a amélioré le bilan routier. On a redressé le fonds d'assurance automobile en améliorant le service à notre clientèle accidentée de la route et en rétablissant des assises financières solides pour le régime d'assurance automobile au Québec. L'indice de satisfaction de la clientèle est de 8,5 sur 10, soit un rendement supérieur à celui des grandes banques et des compagnies d'assurances. Finalement, nos employés sont mobilisés à un taux de 81 %. C'est très encourageant.

Notre plan d'ici 2020 est de continuer à améliorer le bilan routier et de maintenir le haut niveau de satisfaction de la clientèle, principalement en augmentant les services en ligne tout en s'assurant qu'ils sont utilisés.

Le parcours de Nathalie Tremblay en bref

Âge : 53 ans

Études : Nathalie Tremblay est titulaire d'une licence en sciences comptables et d'un baccalauréat en administration des affaires de l'Université Laval.

En poste depuis : mai 2010

Nombre d'employés : environ 3600

Avant d'être PDG : Elle a été chef d'équipe chez Samson Bélair/Deloitte & Touche avant de se joindre au Vérificateur général du Québec. Elle a également été sous-ministre adjointe et contrôleuse des finances au ministère des Finances. À la SAAQ, elle a occupé diverses fonctions, dont vice-présidente et directrice générale du Fonds d'assurance.