Que fait un boutefeu? À quoi ressemble le quotidien d'un animalier ou d'un détective privé? Pour le savoir, La Presse les a rencontrés pour vous. Regard sur des métiers inusités, rares ou méconnus.

Jean-Claude Rosay n'a que 41 ans, mais il n'en reste pas moins que ce Français d'origine exerce son métier depuis près de 30 ans. L'avenir de ce concepteur de niveaux de jeu vidéo s'est joué tôt, dans le garage de ses parents, alors qu'il était encore au primaire. Rencontre avec un vrai mordu.

«En 1982, The Hobbit a été pour moi une révélation. Le jeu sur ordinateur utilisait un programme avancé de reconnaissance de phrases. On tapait simplement les actions que l'on voulait exécuter (aller au nord, par exemple) et l'ordinateur nous répondait. Parfois, on avait même droit à une image», lance Jean-Claude Rosay avec enthousiasme.

Trouver sa voie

Il n'a pas répondu à l'appel du jeu pour autant, puisqu'une telle carrière était selon lui un rêve impossible. Il étudie donc le japonais à Paris. Comme une carrière d'interprète ne l'enchante pas, il retourne sur les bancs d'école, cette fois en infographie. Diplôme en poche, il travaille près de huit ans dans des agences de publicité et de design.

«En 2001, j'ai tenté ma chance dans l'industrie du jeu vidéo en créant mon premier niveau, à l'aide d'un moteur de jeu gratuit, explique Jean-Claude Rosay. J'ai eu de la chance. Une boîte montréalaise m'a remarqué et m'a proposé mon premier poste de concepteur de niveaux, à distance.»

L'entreprise n'a pas survécu pas, mais le concepteur français avait trouvé sa voie. Trois ans plus tard, il débarque au Québec et entre chez Ubisoft en 2005. Il y est toujours, et dirige maintenant 14 personnes.

Maître d'oeuvre

Le concepteur de niveaux peuple un jeu d'obstacles pour faire progresser le joueur tout en lui donnant des défis. Il peut par exemple inclure un ennemi ou une maison à explorer à un endroit donné.

Le travail de Jean-Claude Rosay s'amorce par la recherche sur l'époque et l'environnement du jeu. Il fait ensuite ses premiers croquis sur des feuilles lignées, même dans les transports en commun en route pour Ubisoft.

À l'étage réservé à la création du jeu Far Cry 3, il transpose ses idées à l'ordinateur - entouré de centaines de collègues - et les perfectionne patiemment.

«Comme un peintre, j'améliore mon travail par petites touches», dit-il. Il lui est d'ailleurs arrivé de bosser deux ans sur un niveau de jeuqui, à sa sortie, en était à la 732e version! Oui, Jean-Claude Rosay est un perfectionniste.

Petites et grandes réalisations

Le concepteur de niveaux a un faible pour les jeux en vue subjective, où l'action est perçue à travers les yeux du héros (que l'on appelle dans le milieu des jeux FPS, pour First-Person Shooter). «Ils sont de plus en plus réalistes et permettent de transmettre plus facilement des émotions. En plus, c'est comme du cinéma, ça nous donne l'impression de vivre un film à la première personne», explique-t-il.

Celui qui a travaillé sur quelques-uns des grands succès d'Ubisoft, dont Splinter Cell et Far Cry, avoue ressentir une fierté particulière pour Rainbow Six Vegas. «C'est le premier jeu que j'ai fait en tant que concepteur de niveaux de jeu chez Ubisoft. En plus, le jeu a été essayé par plus de trois millions de personnes dans le monde. C'est très valorisant.»

Jean-Claude Rosay a non seulement quelques réalisations à son actif, il a réalisé un rêve qu'il croyait impossible. Pas mal!