Que fait un boutefeu? À quoi ressemble le quotidien d'un animalier ou d'un détective privé? Pour le savoir, La Presse les a rencontrés pour vous. Regard sur des métiers inusités, rares ou méconnus.

Depuis quelques années, la bière de microbrasserie s'est taillé une place dans le coeur - et le ventre! - des Québécois. Certains brassent même de la bière dans leur garage pendant le week-end. De là à en faire un métier, il y a un pas, que Maxime Chouinard et Julien Braye ont franchi avec plaisir.

Il est à peine 9h30, mais l'air chaud de la brasserie Dieu du ciel! à Saint-Jérôme est déjà imprégné d'une forte odeur de malt. Normal, puisque Maxime Chouinard est aux commandes depuis plus de trois heures. Julien Braye le rejoindra plus tard et prendra le relais pour terminer la journée.

De multiples étapes

«Le premier brasseur pèse les ingrédients, concasse le grain et commence l'empâtage», explique-t-il. À cette étape, le malt concassé est mélangé à de l'eau dans une grande cuve, et le brasseur fait monter la température. Maxime Chouinard est attentif, prêt à intervenir et à modifier le déroulement du brassage en cas d'imprévu.

Aujourd'hui, on brasse la Rosée d'hibiscus. «C'est une bière blanche, qui est plus facile, et qui risque donc moins de mal tourner.»

On laisse reposer un peu (c'est ce qui s'appelle la saccharification), puis on filtre et on transfère dans un autre bassin. «Un fermier du coin vient ramasser chaque jour les résidus pour nourrir son bétail. Il croit qu'il a les meilleures bêtes grâce à nous. Il gagne même des prix», lance le brasseur.

Dans la seconde cuve, le moût est chauffé. Maxime Chouinard ajoute ensuite les épices et laisse à la journaliste de La Presse le soin de mettre le houblon (les amateurs n'ont rien à craindre, puisqu'il avait déjà été mesuré). Le moût est par la suite clarifié, refroidi et pompé vers la cuve de fermentation.

Entre-temps, le deuxième brasseur s'est mis à l'ouvrage. Il nettoie les instruments et les stérilise. «Faire de la bière, c'est 25% de brassage pour 75% de nettoyage», soutient Julien Braye. C'est d'ailleurs ce qu'il fera presque toute la journée, en plus de vérifier la fermentation des autres bières. Heureusement pour lui, les deux brasseurs échangent fréquemment leurs rôles.

La chimie de la broue

La fabrication de la bière est enseignée dans des universités allemandes, belges et américaines, mais il n'existe pas de telle formation ici. Ne s'improvise toutefois pas brasseur qui veut.

Julien Braye en est convaincu: «Des connaissances en sciences ou en chimie facilitent beaucoup notre travail. Il faut par exemple mesurer le pH, la densité, la température et le degré d'alcool, en plus de connaître plusieurs réactions, explique-t-il. Le plus difficile, c'est d'offrir un produit constant.»

Bref, il faut savoir comment réagir si la bière, elle, ne réagit pas correctement.

Une histoire de passion

Les deux brasseurs s'entendent sur une chose: ils adorent leur métier. «On va dans les festivals de bière, on goûte les produits des autres microbrasseries et on en brasse encore entre amis», dit Maxime. La communauté des brasseurs du Québec est d'ailleurs tricotée serré, et se réunit tous les ans le temps d'une soirée. On a déjà vu milieu plus compétitif!

S'ils suivent pour l'instant les recettes de Jean-François Gravel, le maître-brasseur et fondateur du Dieu du ciel!, ils aimeraient tous deux un jour élaborer leur propre mélange. En attendant, ils prennent du galon, une bière à la fois.