Et si l'horaire de travail disparaissait au profit d'une structure organisationnelle orientée seulement vers les résultats? C'est l'idée pas si farfelue que propose ROWE (results-only work environment), mouvement qui commence à prendre de l'ampleur chez nos voisins du Sud. Le Québec suivra-t-il?

«Chaque personne est libre de faire ce qu'elle veut, quand elle veut, du moment que le travail est fait.» C'est ainsi que Jody Thompson décrit ROWE, une approche qu'elle a co-créée avec Cali Ressler et qui change du tout au tout la façon de concevoir le travail. «Ce n'est pas du tout une question d'horaires flexibles, mais plutôt une façon de travailler où on est totalement libre, 24 h sur 24, 7 jours sur  », ajoute-t-elle.

Autant de liberté peut faire peur, mais ROWE donne des résultats très positifs (augmentation de 35% de la productivité), assure Mme Thompson : «Les gens se sentent enfin traités comme des adultes, ils travaillent mieux et plus efficacement, comprennent mieux leur valeur au sein de leur entreprise. Leur job dépend désormais des résultats qu'ils livreront!»

Créée en 2003, le ROWE est d'abord né au sein de la société Best Buy, où les deux femmes travaillaient aux ressources humaines. L'idée, qui laisse une grande place au travail d'équipe, a depuis été adoptée par nombre de compagnies américaines, dont IBM et Gap Outlet. Pour accompagner les entreprises désireuses d'amener ce changement au sein de leur organisation, Jody et Cali ont créé leur propre compagnie, CultuRx. Selon Jody, il faut compter cinq mois pour implanter le tout et près d'un an pour se «sentir ROWE». Car au-delà de la méthode, ROWE est un «new way of life» pour ses créatrices, une philosophie qu'elles expliquent dans leur livre-manifeste Why Work Sucks... And How To Fix It, publié en 2008.

ROWE au gouvernement fédéral?

Peter Hadway a travaillé pendant plus de 20 ans en tant que consultant organisationnel pour le gouvernement fédéral au sein de plusieurs ministères (Justice, Affaires indiennes, Défense...). Sa nouvelle mission? Acheminer ROWE au gouvernement!

«Les gestionnaires fédéraux cherchent constamment des façons d'améliorer les résultats et de créer un meilleur environnement de travail. Je crois que la méthode a un grand potentiel pour améliorer la productivité, mais aussi pour la loyauté, car les employés qui travaillent avec ROWE comprennent mieux le sens de leur travail.»

Le consultant est en train d'élaborer un projet pilote afin de déterminer la faisabilité de la méthode dans les organisations gouvernementales. «J'ai eu quelques discussions préliminaires, mais rien n'a été établi, avoue-t-il. C'est tellement nouveau comme approche ! Mais je crois que le gouvernement pourrait grandement en bénéficier.»

Pour Jody Thompson, en fait, la question n'est pas de savoir si ROWE sera adopté, mais quand. Un avis que partage Jean-François Rougès, doctorant en management et spécialiste de la génération Y.

«Cette approche correspond parfaitement aux besoins des jeunes, qui ne dissocient plus vie professionnelle et personnelle, veulent comprendre le sens de leur travail et travailler en équipe dans le but d'obtenir des résultats. Cependant, cela change totalement le rôle du gestionnaire, qui cesse de contrôler pour devenir pilote, animateur, leader. C'est un grand défi.»

Au Canada, M. Hadwen serait le seul à s'intéresser sérieusement à ROWE présentement, mais Jody Thompson dit recevoir chaque jour des messages de partout à travers le monde : «Go Canada! C'est un changement social; les gens ne toléreront plus longtemps cette structure paternaliste du travail qui a été mise en place durant l'ère industrielle. Nous sommes en 2010 et non en 1952! Il y a l'internet et les téléphones intelligents, mais les gens sont encore obligés de venir au bureau s'asseoir de 8 à 5? C'est juste ridicule!», conclut-elle.

Pour en savoir plus : gorowe.com