L'ex-président de Rona Robert Dutton fait un retour remarqué dans le monde de la quincaillerie et des centres de rénovation. Nouvel administrateur du Groupe BMR, il nous livre ses premières impressions.

PERSPECTIVES INTÉRESSANTES 

« Il y a beaucoup de défis à relever dans le secteur, dit M. Dutton. Mais les perspectives sont intéressantes pour les magasins de moyenne taille. » Hier, la Coop fédérée a annoncé sa nomination à titre de membre externe invité du conseil d'administration. Du coup, il siégera aussi au conseil du Groupe BMR. Avec Unimat, cette filiale du géant agricole possède 350 centres de rénovation au Québec, en Ontario et dans les Maritimes. Ses ventes s'élèvent à plus de 1,7 milliard. Elle emploie 8000 personnes.

MOUVEMENT À VENIR

M. Dutton pense qu'il y a encore du mouvement à venir. « La consolidation n'est pas terminée », ajoute-t-il. L'homme s'y connaît en développement des affaires. Au cours de ses 20 années à la présidence de Rona, les ventes consolidées sont passées de 450 millions à près de 5 milliards. À son départ, le groupe comptait sur plus de 800 magasins affiliés, franchisés et d'entreprise. À titre d'administrateur de BMR, M. Dutton est prêt à reprendre du service. « C'est stimulant, car c'est un environnement que je connais bien », dit-il.

UNE PREMIÈRE

De toute l'histoire de la Coop fédérée, M. Dutton est le premier membre invité au conseil d'administration. Donc le premier à ne pas être producteur agricole. Cette grande coop compte 90 000 membres. Elle regroupe de nombreuses enseignes, dont Olymel, Flamingo, Lafleur et Sonic. Elle compte plus de 12 000 employés. Et des ventes de près de 10 milliards. « M. Dutton a été choisi pour son expertise et son expérience dans le commerce de détail », précise Marie-Hélène Cliche, porte-parole de la coop.

L'EFFET LOWE'S

BMR est le plus important regroupement de marchands québécois spécialisés en rénovation, depuis la vente de Rona à l'américaine Lowe's. En février dernier, la Coop fédérée n'avait pas caché son intérêt pour des marchands indépendants de Rona, indisposés par cette transaction. « Nous sommes dans une phase où l'on se courtise et se regarde » avait-on indiqué à La Presse Canadienne. Pour sa part, Robert Dutton précise qu'il ne fera pas de « sollicitations » auprès des marchands Rona. « Ça n'a pas été discuté, dit-il. Et je n'ai pas l'intention de le faire. »

ZONE GRISE

Cela dit, il constate une « zone grise » pour les marchands indépendants Rona. « Depuis l'arrivée de la Caisse de dépôt dans le dossier, on ne fait rien pour eux, dit-il. Si j'étais marchand, je serais préoccupé de la situation. Certains auront à prendre des décisions dans les prochains mois et les prochaines années. » Après l'achat de Rona par Lowe's au début de l'année, une petite mention a été ajoutée aux publicités : « Naturellement BMR, Québécois depuis toujours. » « Rona a coupé toute sa publicité, remarque M. Dutton. BMR prend sa place. Et elle a raison de le faire. »

PRISE DE DÉCISIONS

M. Dutton s'est élevé contre la vente de Rona à des intérêts étrangers. Le mois dernier, il a affirmé que la Caisse de dépôt et placement du Québec était responsable de son départ et de la vente de Rona. « J'ai réagi avec émotion, car la situation est préoccupante, dit-il. Il faut assurer la prise de décisions au Québec et la survie des emplois. » Même si son rôle au conseil touchera l'ensemble des activités de la Coop fédérée, le coeur de Robert Dutton est lié au monde de la rénovation. « La quincaillerie, c'est toute ma vie, dit-il. J'ai encore un apport et une vision à offrir. »

DÉJÀ-VU

L'histoire a des airs de déjà-vu. Dans les années 80, la Caisse de dépôt avait manoeuvré pour retirer la direction de Provigo à Pierre Lessard et à Paul Gobeil. Le tandem avait été remplacé par celui de Bertin Nadeau et de Pierre Lortie. On connaît la suite. Provigo a perdu des plumes et a été vendu à l'ontarienne Loblaw. Puis, à partir de 1990, MM. Lessard et Gobeil ont relancé Metro pour en faire un leader de l'alimentation au Québec. Est-ce que l'histoire se répète ? « Non, car je ne gère plus d'entreprises, dit celui qui est professeur associé à l'École des dirigeants de HEC Montréal. Mais j'ai bien l'intention d'apporter ma contribution. »