L'entreprise Vergers Paul Jodoin n'a pas à se plaindre. Ses pommes emballées et ses produits transformés (jus réfrigérés, moûts, smoothies) trouvent largement preneurs au Québec, où l'entreprise réalise 95% de son chiffre d'affaires. Il en va autrement ailleurs au Canada, où elle peine à marquer des points. Mais pas question d'abandonner pour autant, disent les trois frères Jodoin à la tête de cette PME de 60 employés.

Les entreprises agroalimentaires du Québec ont peu de possibilités si elles veulent prendre de l'expansion ailleurs au Canada, dit en substance Pierre Jodoin, président.

«Chaque province aime mieux favoriser ses producteurs locaux, dit-il. On l'a vite compris. Après avoir fait une belle percée en Ontario, on s'est fait sortir des épiceries. On nous a dit que des Ontariens offraient des produits semblables aux nôtres. Et c'est vrai!»

Bref, à moins d'avoir un produit unique, l'autre solution est de carrément s'établir dans la province convoitée. «C'est ce que Lassonde [fabricant québécois des jus Oasis] a fait. Nous y avons pensé aussi. Mais l'usine que nous convoitions en Ontario était tellement en mauvais état que ça nous aurait coûté une fortune de repartir à zéro. Payer cher pour simplement être listé dans des magasins ontariens, non merci!» dit pour sa part Sylvain Jodoin, vice-président.

Vergers Paul Jodoin tire 50% de ses revenus - confidentiels - de la vente de pommes emballées. La PME possède 600 acres de pommiers. Elle est l'un des plus importants pomiculteurs au Québec. Elle construit actuellement un entrepôt à atmosphère contrôlée, doublé d'une salle de préclassage à la fine pointe. Un investissement de 6 millions.

Ses autres revenus proviennent de la quinzaine de jus de fruit (réfrigérés ou «tablettes») qu'elle produit dans son usine de Saint-Jean-Baptiste sur le flanc nord de la montagne de Rougemont. Les jus, moûts et smoothies sont vendus sous les marques Tradition, Tradition Vision Santé et Tradition Biologique.

À ce jour, c'est avec ses jus que Vergers Paul Jodoin a tenté de faire sa place hors Québec. L'entreprise ne délaissera pas cette stratégie pour autant, car elle cherche constamment à concevoir de nouveaux élixirs. Elle s'applique plutôt ces temps-ci à peaufiner un produit de niche à base de pommes (et ce n'est pas un jus!) qui pourrait lui ouvrir toutes grandes les portes du marché canadien.

Bien sûr, pour des raisons stratégiques, les propriétaires refusent de dévoiler la nature du produit en question. Mais Pierre, Sylvain et François Jodoin sont persuadés que cette fois-ci sera la bonne.

Ils ont peut-être fait chou blanc par le passé en matière d'exportation ailleurs au Canada, mais leur flair les a plutôt bien servis depuis qu'ils sont dans les affaires. Il est vrai que, récemment, leurs jus avec probiotique n'ont pas connu le succès escompté dans la Belle Province. N'empêche.

Tous les trois dans la jeune cinquantaine, les frères Jodoin ont repris l'entreprise de culture et d'emballage de pommes que possédait leur père Paul (d'où le nom de la PME). Chez les Jodoin, on est pomiculteur dans la région de Rougemont depuis 1901.

Ne voulant plus être tributaires de leurs récoltes de pommes, les Jodoin ont cherché à diversifier leurs activités. Ils ont jeté leur dévolu sur la fabrication de jus de pomme brut. C'était en 1992, à une époque où, pour le Québécois moyen, le jus de pomme était jaune et clair. «Notre jus de pomme brut est brunâtre; les épiceries que nous tentions de convaincre trouvaient que ça ressemblait à de l'huile à moteur», se souvient Pierre Jodoin.

De fil en aiguille, leur ténacité a fini par payer. La PME fabrique aujourd'hui des millions de litres de jus (pomme, poire, raisin, limonade, pêche, etc.). En sera-t-il de même avec le nouveau produit destiné au marché canadien?

En bref:

Activités: pomiculteur et producteur de jus de fruits

Chiffre d'affaires: N/D

Employés: 60 à temps plein et 160 durant les récoltes

Territoire de vente: 95% au Québec; 5% en Ontario.

Objectif: développer de nouveaux produits afin de percer le marché canadien.