L'économie canadienne a créé 32 300 emplois le mois dernier, tous des emplois à temps plein, ce qui a aidé le taux de chômage à rester à son creux record.

Statistique Canada a indiqué vendredi que le taux de chômage s'était maintenu à 5,8 % en mars, pour un deuxième mois consécutif - et pour la troisième fois depuis décembre. Il s'agit de son plus faible niveau depuis que l'agence a commencé à compiler ces données, en 1976. Un tel taux de chômage n'a été observé qu'une seule autre fois, en 2007.

Les gains de mars ont été alimentés par une vague d'emplois à temps plein. Le marché du travail a accueilli un total de 68 300 nouveaux travailleurs à temps plein, tandis que le nombre de travailleurs à temps partiel a diminué de 35 900.

Mais au-delà des chiffres utilisés dans les manchettes, certains économistes ont estimé que les données dressaient un portrait plus nuancé et qu'elles contenaient peu d'information qui puisse permettre d'altérer de façon importante le raisonnement de la Banque du Canada d'ici à sa décision du 18 avril sur les taux d'intérêt.

Par exemple, le rapport de Statistique Canada montre que 19 600 des nouveaux postes d'employé ont été créés dans le secteur public. En comparaison, le nombre de travailleurs dans le secteur privé a reculé de 7000.

Brian DePratto, économiste principal à la Banque TD, a aussi noté que 19 800 des nouveaux emplois se trouvaient dans la catégorie, moins désirable, du travail autonome - un groupe qui comprend les personnes qui travaillent dans une entreprise familiale sans être rémunérées.

M. DePratto a aussi souligné que le nombre d'heures travaillées était resté essentiellement stable, tout comme la croissance des salaires, qui se situe légèrement au-dessus de 3 % depuis quelques mois. Même si la croissance des salaires s'est améliorée considérablement depuis le milieu de 2017, M. DePratto croit que le gouverneur de la banque centrale, Stephen Poloz, aimerait davantage voir une croissance supérieure à 4 %, comparable à celle observée avant la récession de 2008-09.

«Certains éléments sont solides, mais (d'autres) sont un peu plus faibles», a affirmé l'économiste au sujet du rapport sur l'emploi dans son ensemble.

Près d'une pleine capacité

Par rapport au mois de mars 2017, la population active canadienne s'est accrue de 1,6 %, grâce à la création de 296 200 emplois. La totalité de cette croissance a été alimentée par la création de 335 200 emplois à temps plein.

Mais ces derniers mois, les données ont montré certains signes de ralentissement pour le marché canadien de l'emploi, qui atteint essentiellement sa pleine capacité, ce qui était largement attendu.

L'emploi a diminué d'environ 40 000 postes au cours du premier trimestre de 2018, soit un déclin de 0,2 %, a précisé Statistique Canada.

L'économiste en chef adjointe de la Banque Royale Dawn Desjardins a souligné que l'économie avait offert une performance décevante pendant les trois premiers mois de l'année, en affichant un premier déclin trimestriel de l'emploi depuis 2010.

Malgré tout, elle estime que certains éléments, comme la croissance des salaires, la faiblesse du taux de chômage et la hausse de l'inflation de base rapprochent la banque centrale d'une nouvelle hausse de taux. M. Poloz a haussé le taux directeur de la Banque du Canada à trois reprises depuis juillet dernier.

«(Ils) mettent à l'épreuve l'argument de la banque centrale voulant qu'il reste une certaine capacité non utilisée dans le marché du travail», a écrit Mme Desjardins dans une note de recherche.

«Lorsqu'on tient compte de la croissance en douce de l'inflation de base, l'argumentaire voulant que la banque doive remettre à la deuxième moitié de l'année un nouveau resserrement des conditions monétaires s'affaiblit.»

La Banque du Canada a souvent répété à quel point la croissance des salaires était un indicateur clé.

La croissance moyenne du salaire horaire a grimpé à 3,3 % en mars, par rapport à 3,1 % en février, a précisé vendredi Statistique Canada. Elle progresse depuis qu'elle a touché un creux de 0,5 % en avril 2017.

Chômage stable au Québec

Les deux plus grandes provinces du pays, l'Ontario et le Québec, ont toutes deux accueilli plus de 10 000 nouveaux travailleurs, en données nettes.

L'économie québécoise a affiché un gain net de 16 000 emplois par rapport à février, soit 0,4 %, incluant 28 600 emplois à temps plein. Le taux de chômage y est resté inchangé à 5,6 %.

En Ontario, le gain net d'emplois s'est chiffré à 10 600, incluant 16 300 emplois à temps plein, et ne représentait qu'une croissance de 0,1 % par rapport au mois précédent.

La population active de la Saskatchewan a grimpé de 0,7 %, tandis que celle de l'Alberta s'est accrue de 0,4 %. Le taux de chômage albertain a reculé à 6,3 %, par rapport à 6,7 % en février.

Les industries productrices de biens ont accueilli 21 700 nouveaux postes, surtout en construction. Les secteurs des services ont créé 10 600 emplois, dont la plupart émanant de nouveaux postes dans les administrations publiques.