Malgré le Vendredi fou qui a rempli les magasins, l'expansion canadienne a brutalement appliqué les freins en novembre.

Bien sûr, la chute de production d'hydrocarbures était à prévoir après deux mois de forte augmentation et la dégringolade des prix.

Les données détaillées sur la variation réelle mesurée par industrie du produit intérieur brut (PIB) publiées hier par Statistique Canada montrent toutefois une faiblesse diffuse de l'économie.

Le PIB réel a reculé de 0,2% d'octobre à novembre, ployant sous le poids des reculs de 1,5% de l'extraction minière, de pétrole et de gaz, mais surtout sous celui de 1,9% de la production en usines.

Le bond de 0,9% des ventes des détaillants signifie sans doute que les consommateurs ont devancé leurs emplettes de Noël pour profiter des promotions réelles ou fictives annoncées pour le Vendredi fou.

Les conjoncturistes s'attendaient plutôt à ce que l'expansion ait marqué le pas simplement.

De novembre à novembre, le rythme d'expansion a ralenti à 1,9%.

Sur une base annuelle, la croissance de la fabrication n'est plus que de 1,3%, contre 4,3% pour l'extraction.

La substitution de la seconde par la première comme moteur de la croissance canadienne ne s'était pas matérialisée encore à l'automne.

Le gouverneur de la Banque du Canada, Stephen Poloz, avait déploré la semaine dernière, dans la foulée de l'annonce de la baisse du taux directeur, que cette rotation impérative tarde à se concrétiser d'autant que les investissements dans l'industrie des hydrocarbures vont plonger.

La Banque a néanmoins pesé fort sur le crayon en estimant à 2,5% le rythme annualisé de l'expansion canadienne durant l'automne.

Grâce à la forte poussée donnée par septembre et la contribution de 0,3% en octobre, l'acquis de croissance s'élève à 1,8% jusqu'ici.

Il aura fallu que l'économie retrouve beaucoup de tonus en décembre pour que s'avère la prévision des autorités monétaires.

Cela milite pour une nouvelle baisse de 25 centièmes, à 0,50%, du taux directeur le mois prochain.

Dans son scénario récent, la Banque prévoit que la chute des prix du pétrole ralentisse la croissance en cette première moitié de 2015. En novembre, le prix moyen du baril de pétrole de référence Western Canada Select était de 48$US. Il se situe ces jours-ci à 31$US.

Se peut-il que le choc pétrolier ait commencé à mordre dans la croissance canadienne un peu plus tôt?

En novembre, les services de soutien aux entreprises de même que les services financiers ont tous deux reculé, tout comme le transport et l'entreposage. Ces industries sont en partie tributaires du secteur de l'énergie.

Le repli de la fabrication est plus intrigant. La production en usines aux États-Unis est en forte hausse, même si les fabricants américains doivent composer avec une monnaie qui s'appréciait déjà durant l'automne contre la plupart des autres devises.

Aux États-Unis, le rythme d'expansion a aussi diminué durant l'automne. Selon l'estimation préliminaire du département du Commerce, le rythme d'expansion annualisé a été de 2,8% d'octobre à décembre, contre 5,0% durant l'été et 4,8% au printemps. Plusieurs prévisionnistes jugent que la décélération se poursuit, ce qui diminue les perspectives de relance notable des exportations canadiennes.

Les importations américaines ont bondi de 8,9%, et la consommation des ménages a augmenté de façon exceptionnelle durant l'automne. La hausse de 4,3% est la plus forte depuis le premier trimestre de 2006.

La faiblesse du huard face au billet vert diminue les coûts de production des fabricants canadiens par rapport à leurs concurrents américains ou même chinois dont la monnaie est arrimée au dollar américain. Elle ne procure aucun avantage toutefois face à leurs concurrents européens, mexicains ou japonais sur le marché américain puisque leurs monnaies se déprécient tout autant que le huard.

Le nouveau recul de l'inflation dans la zone euro (- 0,6% en janvier) suggère que la banque centrale va tout faire pour éviter une baisse générale des prix. Elle va chercher à affaiblir davantage l'euro pour relancer la croissance. Elle vise à augmenter la compétitivité des manufacturiers européens sur le marché américain et, dans une moindre mesure, sur le nôtre aussi.