Dans la guerre qui oppose les démocrates et les républicains au sujet des compressions budgétaires aux États-Unis, des entreprises québécoises du secteur de la défense pourraient se retrouver sur la ligne de tir.

«Le Canada et les États-Unis partagent une base industrielle de la défense, rappelle le président de l'Association des industries canadiennes de défense et de sécurité, Tim Page, dans une entrevue téléphonique avec La Presse Affaires. Tout ce qui a un impact sur le marché américain aura un impact sur l'industrie canadienne.»

L'analyste Benoît Poirier, de Valeurs mobilières Desjardins, indique que plusieurs entreprises pourraient être touchées, comme CAE [[|ticker sym='CAE'|]] et, surtout, Héroux-Devtek [[|ticker sym='HRX'|]].

«Cette entreprise tire 59% de ses revenus du domaine de la défense, et une partie de ces revenus est liée au Joint Strike Fighter (JSF), écrit-il dans un rapport de recherche. Nous demeurons circonspects au sujet du JSF parce qu'il est devenu une cible pour les politiciens qui cherchent à contrôler les dépassements de coûts dans les programmes de la défense.»

Depuis deux mois, un comité du Congrès américain composé de six démocrates et de six républicains tente de s'entendre sur un plan de réduction du déficit. Ce super comité, comme on le surnomme à Washington, a jusqu'au 23 novembre pour proposer un plan qui permettrait de réduire le budget américain de 1200 milliards US au cours des 10 prochaines années. Ce plan pourrait comprendre des réductions de dépenses, mais aussi des augmentations de taxes. Si le super comité rate l'objectif, le couperet tombera automatiquement sur les dépenses discrétionnaires du gouvernement américain.

Des compressions de 1200 milliards US s'effectueront tant du côté du budget de la défense que du côté des dépenses civiles, comme l'éducation, les services sociaux et l'environnement.

Loin d'une entente

Cette disposition visait à forcer les républicains et les démocrates à s'entendre sur un plan de réduction du déficit. Or, les congressistes sont encore loin d'une entente. Selon Reuters, les démocrates veulent que le plan comprenne une augmentation de taxes alors que les républicains sont totalement opposés à cette idée.

Benoît Poirier estime que le couperet automatique entraînerait des compressions de 600 milliards US dans le budget américain de la défense, qui s'additionneraient à des coupes de 350 milliards US déjà planifiées. On parlerait donc d'une réduction de près de 1000 milliards US.

Selon le secrétaire américain de la Défense, Leon Panetta, une telle réduction reviendrait à «se tirer dans le pied».

M. Page soutient de son côté que les menaces qui pèsent sur le monde industrialisé demeurent bien présentes.

«Les gouvernements doivent continuer à faire preuve de vigilance et à assurer la sécurité des populations, affirme-t-il. Cela implique des investissements dans la défense et la sécurité.»

Quels impacts?

Selon Benoît Poirier, le programme du JSF pourrait être touché. Or, chaque appareil génère des revenus d'environ 750 000$US pour Héroux-Devtek, qui fournit notamment des éléments de structures.

M. Poirier indique que le gouvernement pourrait annuler une des versions du JSF et retarder la livraison d'un certain nombre d'appareils.

«Sur une note plus positive, Héroux-Devtek est bien positionnée sur d'autres programmes comme le C-130, qui est en grande demande et qui ne risque pas d'être annulé, ajoute-t-il. Les affaires d'Héroux-Devtek avec le département américain de la Défense se concentrent également du côté du soutien après-vente, qui devrait demeurer plus solide que la fabrication.»

M. Poirier ne croit pas que la perspective d'importantes compressions dans le budget américain de la défense ait des impacts dramatiques sur CAE. Essentiellement, l'entreprise ferait face à des délais dans l'attribution de contrats.

«À moyen terme, CAE devrait être relativement protégée des compressions budgétaires en raison des économies offertes par la formation basée sur la simulation, écrit-il. À long terme, nous croyons toujours qu'il y aura une utilisation accrue de la simulation, mais nous ne verrons cela que lorsque les gouvernements auront décidé quels programmes supprimer.»

La vice-présidente aux communications de CAE, Nathalie Bourque, note que la formation basée sur la simulation représente environ 10% des coûts de la formation à bord d'appareils.

«Nous faisons partie de la solution», lance-t-elle.