Les fonctionnaires fédéraux avaient prévenu que l'acquisition de Potash Corp par l'entreprise anglo-australienne BHP Billiton pourrait priver Ottawa d'une «source importante de revenus», selon des documents dont La Presse Canadienne a obtenu copie.

Le gouvernement fédéral s'était montré avare de commentaires sur les raisons motivant son refus de permettre cette transaction entre l'entreprise de la Saskatchewan et le géant minier de l'Australie, l'an dernier.

Le ministre de l'Industrie de l'époque, Tony Clement, s'était contenté d'indiquer que l'accord ne serait pas un avantage net pour le Canada.

Une note interne rédigée à l'intention du sous-ministre des Ressources naturelles, Serge Dupont, soulignait toutefois que les possibles impacts de cette transaction sur les revenus gouvernementaux étaient «imprévisibles».

Les documents ne précisent pas si les revenus en question étaient de nature provinciale ou fédérale.

Le premier ministre de la Saskatchewan, Brad Wall, avait mené une campagne active pour empêcher le rachat de Potash Corp., soutenant que la province y perdrait entre 3 et 6 milliards de dollars en revenus en une décennie.

Il avait également affirmé lors d'un discours qu'Ottawa aussi serait pénalisé, ne pouvant plus récolter l'argent de l'impôt.

BHP Billiton avait alors assuré le gouvernement fédéral que la Saskatchewan continuerait d'engranger les mêmes recettes fiscales si la vente était conclue, mais les documents laissent entendre que les fonctionnaires fédéraux n'ont pas été satisfaits de l'offre.

L'entreprise anglo-australienne aurait été en mesure d'amortir ses frais d'immobilisation avec un autre projet d'exploitation de potasse en Saskatchewan, la mine Jansen, contre les profits réalisés par Potash Corp.

Cela aurait priver le gouvernement fédéral de l'impôt sur les bénéfices collectés sur les profits que génèrent le développement de ressources naturelles.

«Si l'acquisition entraîne certaines dépenses déductibles de l'impôt sur les bénéfices, cela affectera les impôts fédéral et provincial sur les sociétés», a indiqué le professeur en économie de l'Université Queen's, Robin Boadway.

Les impacts possibles pour les recettes fiscales en général semblaient aussi évidentes pour le gouvernement fédéral.

«Les revenus issus du régime de redevances sont importants: ils représentent 35 pour cent de toutes les redevances pour les minéraux non combustibles engrangés entre 2005 et 2008 au Canada», indique-t-on dans le document.

«D'importantes dépenses en immobilisations peuvent réduire les paiements de redevance qui auraient été versés autrement et reporter de plusieurs années les paiements», ajoute-t-on.

Un porte-parole du ministère des Ressources naturelles, Paul Duchesne, a refusé de commenter l'affaire, soutenant que toute l'information liée à la vente de Potash Corp est sous la protection de la loi sur Investissement Canada.