La promesse du Parti libéral d'annuler le contrat d'achat de 65 chasseurs F-35 inquiète l'industrie aéronautique même si celle-ci essaie de se tenir loin de la politique partisane.

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«Je ne fais pas de politique, mais une chose que je sais, c'est que (le contrat) sera très important pour l'économie du Québec, a déclaré le président et chef de la direction d'Héroux-Devtek, Gilles Labbé, dans le cadre de l'assemblée annuelle d'Aéro Montréal, grappe aérospatiale du Québec, dont il est également président du conseil d'administration. Il y a plusieurs fournisseurs qui sont déjà dans la chaîne d'approvisionnement.»

La vice-présidente aux communications de CAE, Nathalie Bourque, a rappelé que le Canada a déjà participé au projet de F-35, le Joint Strike Fighter, dès 1997, alors qu'un gouvernement libéral était au pouvoir. Elle a également souligné que le gouvernement canadien avait investi des sommes importantes dans le développement de l'appareil au cours des années, soit plus de 168 millions de dollars jusqu'ici.

«Mais ce qui est encore plus important, c'est que les experts de la Défense ont choisi le F-35, a-t-elle déclaré à La Presse Affaires. Pour CAE, il faut qu'on réalise que nos troupes en ont besoin.»

Le président de L-3 Communications MAS, Sylvain Bédard, a rappelé que les CF-18 de la Défense nationale arriveront à la fin de leur vie utile dans les années 2020. C'est d'ailleurs son entreprise, située à Mirabel, qui a modernisé ces appareils au cours des dernières années pour leur permettre d'atteindre 2020.

«La nécessité de remplacer les CF-18 devrait être une préoccupation de tout bon gouvernement», a-t-il déclaré.

Le président de l'Association des industries aérospatiales du Canada (AIAC), Claude Lajeunesse, s'est fait encore plus direct.

«Ce qui est important, c'est de conserver des emplois et de créer de nouveaux emplois, a-t-il affirmé. Pour nous, c'est préoccupant de voir que, dans l'aérospatiale, on se mettrait dans une situation où on perdrait des emplois, et pas uniquement des emplois directs. Les technologies de pointe que nous développons avec le F-35 vont permettre à nos entreprises de compétitionner dans le domaine civil.»

Les réticences du parti libéral face aux F-35 sont liés à plusieurs éléments, et notamment à l'absence d'appel d'offres.

«L'appel d'offres a été fait il y a plusieurs années par le gouvernement américain, a soutenu M. Bédard. Deux entreprises ont compétitionné et Lockheed Martin a gagné. Le Canada a décidé d'appuyer le programme dès ce moment-là.»

L'autre objection porte sur le fait que, contrairement aux programmes d'acquisitions des avions de transports C-130-J et C-17, le programme de F-35 ne prévoit pas d'obligations en fait de retombées régionales.

«Ça a été une décision prise par tous les pays impliqués, a rappelé Mme Bourque, de CAE. Nous respectons cela.»

M. Labbé, d'Héroux-Devtek, a rappelé que cette régle s'appliquait tous les pays.

«Nous compétitionnons sur la même base, c'est à nous de prouver que nos offres de services sont aussi bonnes que celles des Australiens, des Turcs ou des Italiens, a-t-il affirmé. Nous sommes concurrentiels, nous pouvons trouver notre place.»

Il a soutenu que, grâce à ce système, les fournisseurs choisis, comme son entreprise, pouvaient faire des composantes pour de 3000 à 5000 appareils, et non pas pour les seuls 65 appareils acquis par le gouvernement canadien.

Le dernier argument des libéraux et des autres partis d'opposition à l'encontre des F-35 porte sur l'explosion du prix de cet appareil. En fait, à l'heure actuelle, il est difficile de savoir combien coûtera chaque JSF.

«Nous sommes au début du programme, a affirmé M. Labbé. Au fur et à mesure que les quantités d'avions augmenteront, le prix de chaque appareil diminuera.»