Le Canada vient de s'entendre avec huit paradis fiscaux pour obtenir des renseignements sur les contribuables canadiens qui cachent leur argent au fisc.

Ces accords d'échange de renseignements fiscaux ont été signés en juin. Ils portent à neuf sur dix-sept le nombre de traités que le gouvernement canadien s'est engagé à signer avec des pays à faible taux de taxation. Parmi les juridictions qui ont signé avec le Canada en juin, mentionnons les Bamahas, les Bermudes, les îles Caïmans et les îles Turks et Caicos.

Les ententes ont été signées dans la foulée de la réunion du G20, à Londres, en avril 2009. Les pays industrialisés s'étaient alors entendus pour faire ratifier de telles ententes afin de contrer l'évasion fiscale.

Essentiellement, ces accords d'échange de renseignements fiscaux permettront au fisc canadien d'obtenir des renseignements sur les avoirs des contribuables canadiens dans ces paradis fiscaux.

Depuis toujours, cette information est protégée par le secret bancaire et la confidentialité légendaire de ces juridictions. Au moment de l'entrée en vigueur des accords, les juridictions concernées devront avoir modifié leurs lois pour permettre, par exemple, que l'État puisse avoir accès au compte bancaire d'un contribuable étranger.

Les renseignements sur la propriété des fiducies, des fondations et des autres entités juridiques devront également être accessibles, est-il indiqué dans les Accords, publiés sur le site internet du ministère canadien des Finances.

Les paradis fiscaux doivent ratifier de telles ententes avec les pays industrialisés sans quoi ils sont passibles de sanctions. «Ces pays sont à genou. Je n'aurais jamais cru que ça se signerait aussi vite», dit Éric Labelle, fiscaliste international chez Raymond Chabot Grant Thornton (RCGT).

L'envers de la médaille

En contrepartie de ces accords, le Canada semble avoir accordé un avantage à ces juridictions. Les filiales d'entreprises canadiennes actives établies dans ces îles pourront en effet rapatrier leurs profits étrangers au Canada en franchise d'impôts.

Ainsi, les Bermudes, comme les Bahamas et les autres îles, obtiendront un statut semblable à celui de la Barbade, seul paradis fiscal à avoir ce privilège. «À première vue, ça peut paraître bizarre, mais, dans les faits, ces rapatriements libres d'impôts sont justifiables du point de vue fiscal canadien», dit M. Labelle.

Le fiscaliste fait valoir qu'en étant imposées minimalement dans les pays tiers, les entreprises canadiennes peuvent rapatrier plus de dividendes au Canada; ces dividendes seront éventuellement imposés entre les mains des actionnaires.

Le professeur Gilles Larin, de l'Université de Sherbrooke, a toutefois de grands doutes sur l'efficacité réelle de ces accords. «Pour colliger des renseignements fiscaux et les interpréter, il faut une infrastructure et des fonctionnaires nombreux et compétents. Or, ce n'est souvent pas le cas dans ces juridictions», dit M. Larin, qui est titulaire de la chaire de recherche en fiscalité de l'Université de Sherbrooke.

Éric Labelle croit tout de même que ces accords inciteront de nombreux Canadiens à faire des divulgations volontaires au fisc concernant leurs avoirs à l'étranger.

Parmi les juridictions qui restent à signer, mentionnons Liberia, les îles Vierges britanniques et Bahreïn. Chaque accord entrera en vigueur au moment où les deux parties contractes l'auront sanctionné dans leurs juridictions respectives.

Le Canada a des conventions fiscales avec 87 pays. Ces conventions ont une portée plus large que les accords de renseignements fiscaux, notamment en ce qui a trait à la double imposition des revenus.