C'était le dernier véritable punch qui n'avait pas été dévoilé avant le budget: l'ensemble des contribuables aura droit à un allègement fiscal de 3 milliards de dollars, soit près de 20 milliards sur cinq ans.

Même si le Canada retombe en déficit, Jim Flaherty consent des baisses d'impôts généralisées et permanentes, en modifiant les grilles d'impôt.

 

Par exemple, un célibataire qui gagne 90 000$ aura droit à une économie d'impôt annuelle de 264$. Sa paie hebdomadaire augmentera de 5$! Il s'agit de l'économie maximale. «À 5$ par semaine, est-ce que ça va relancer l'économie? J'en doute», dit Stéphane Leblanc, fiscaliste associé chez Ernst&Young.

Chose certaine, on est loin de la recette américaine: un chèque qui arrive d'un coup sec par la poste, souligne Luc Godbout, professeur de fiscalité à l'Université de Sherbrooke. «Ce sont des baisses d'impôts généralisées, permanentes, et égrenées dans le temps. C'est chèrement payé pour l'impact que cela va avoir sur la relance économique», dit-il.

Mais François Dupuis, économiste en chef au Mouvement Desjardins, est plus partagé. «C'est une mesure qui était contestable, car les baisses d'impôts n'ont pas un grand effet multiplicateur sur l'économie. Mais dans le contexte, le budget devait viser large pour être sûr d'atteindre sa cible», dit-il.

La grille monte d'un cran

Plus précisément, le ministre Flaherty abaisse l'impôt de tous les Canadiens en rehaussant la grille d'imposition de 7,5% par rapport à 2008. Mais il était déjà prévu que la grille serait indexée à l'inflation de 2,5% en 2009, indique M. Leblanc. «Le vrai cadeau du budget, c'est 5%», dit-il.

Ainsi, le montant personnel de base, c'est-à-dire le revenu que les Canadiens peuvent gagner sans payer aucun impôt fédéral, grimpera de 9600$ en 2008 (10 100$ en 2009 avant le budget) à 10 300$ en 2009.

Au-dessus de cette barre, les contribuables paieront 15% d'impôt jusqu'à un revenu de 40 726$, au lieu de 37 885$ en 2008 (38 832$ prévu en 2009 avant le budget).

Passé ce seuil, les contribuables verseront 22% au fisc, jusqu'à un niveau de 81 452$, au lieu de 75 769$ en 2008. Au-dessus de ce niveau, les contribuables paieront le taux maximal qui s'élève à 26%.

Ce lifting de la grille d'imposition se traduira par des économies d'impôt de 470 millions en 2008-2009, et de 1,9 milliard l'année suivante.

Les changements sont applicables rétroactivement au 1er janvier 2009. Mais dans la pratique, il faudra attendre que l'Agence du revenu révise ses tables de retenues d'impôt, au printemps. Ainsi, les travailleurs auront un peu plus d'argent sur leur paie à partir de l'été prochain.

Familles, aînés, pauvres

En outre, le ministre Flaherty tend plus spécifiquement la main aux familles, aux aînés et aux bénéficiaires de l'aide sociale.

D'abord, le budget restaure l'architecture de la Prestation fiscale canadienne pour enfants (PFCE), pour qu'elle s'imbrique dans la nouvelle grille d'imposition. Globalement, les parents y gagneront 230 millions.

Présentement, les familles ont droit à 1307$ par enfant. Mais cette somme diminue lorsque les revenus du ménage excèdent 37 885$. Désormais, cette limite sera repoussée à 40 725$, exactement au même point que le premier palier d'imposition.

Pour une famille de deux enfants, qui compte sur deux revenus totalisant 50 000$, les gains s'élèvent à 74$.

En plus de la PFCE, les familles à faibles revenus reçoivent un supplément qui atteint jusqu'à 2025$ pour le premier enfant.

Mais cette somme diminue graduellement et disparaît lorsque les revenus du ménage dépassent 37 885$. Ce seuil sera aussi repoussé à 40 725$.

Pour une mère de famille seule qui gagne 30 000$, avec un enfant, cela se traduit par un gain de 225$.

Par ailleurs, les conservateurs donnent aussi un peu d'air aux aînés. Le crédit en fonction de l'âge grimpera de 1000$, pour atteindre 6408$ en 2009. Calculé au taux de 15%, la valeur du crédit s'établit donc à 125$, en tenant compte de l'abattement. Grâce à cette majoration, quelque 2,2 millions d'aînés économiseront 80 millions en 2008-2009 et 325 millions l'année suivante.

Finalement, Ottawa bonifiera la Prestation fiscale pour le revenu de travail. Ce programme, lancé en 2007, vise à aplanir les obstacles financiers qui découragent les bénéficiaires de l'aide sociale à réintégrer le marché du travail. Près d'un million de Canadiens s'en sont prévalus.

Dès 2009, les conservateurs doubleront l'enveloppe de ce programme, en y injectant 580 millions. Mais les détails restent à définir. Ottawa doit négocier avec certaines provinces, comme le Québec, qui ont choisi d'adapter le programme à leurs besoins.

 

Les retraits du FERR, ça passe!

Les retraits annuels minimums du Fonds enregistré de revenus de retraite (FERR) seront bel et bien réduits de 25%, comme les conservateurs l'avaient annoncé dans l'énoncé économique qui avait mis le feu aux poudres au Parlement, avant Noël. Ainsi, un retraité qui devait retirer 8% de son FERR, n'aura plus à retirer que 6%, par exemple. Cette modification vient soulager les investisseurs dont le portefeuille a subi les contrecoups de la Bourse et qui ne voulaient pas être forcés de vendre des titres à perte. Le budget confirme que le gouvernement ira de l'avant avec cette modification qui était déjà en vigueur depuis l'énoncé économique. Les retraités qui ont retiré trop d'argent de leur FERR pour 2008 pourront le remettre, suivant certaines conditions. - Stéphanie Grammond