L'annonce d'un sauvetage d'Opel par l'équipementier canadien Magna a suscité hier à la fois le soulagement en Allemagne et en Belgique, où est aussi implantée une usine Opel, et l'inquiétude sur les coupes à venir dans les effectifs.

Opel «a désormais une perspective d'avenir», s'est félicitée la chancelière Angela Merkel, après une négociation nocturne marathon pour sauver le constructeur et ses 50 000 emplois en Europe, dont la moitié en Allemagne. «Les salariés le méritent, car ils ne sont pas responsables de la situation, qui est le résultat d'une gestion catastrophique de GM aux États-Unis», a-t-elle estimé.

Magna compte supprimer 10% des effectifs allemands, soit 2500 personnes, sans fermeture d'usine, mais n'a pas encore précisé le détail des suppressions d'emplois. Et dans toute l'Europe, environ 11 000 des 50 000 postes seraient menacés, selon une source gouvernementale.

«Nous avons bon espoir de trouver des solutions pour préserver autant d'emplois que possible», a déclaré Siegfried Wolf, l'un des dirigeants de Magna, à des journalistes à Berlin.

Le patron du groupe canadien, Frank Stronach, cité par The Globe and Mail, a déclaré vouloir fabriquer des voitures Opel au Canada, sans préciser où les véhicules pourraient être assemblés.

«Je sais que nous pouvons être concurrentiels, je sais que nous pouvons créer des emplois au Canada et aux États-Unis», a ajouté M. Stronach au quotidien de Toronto, où il a ouvert son premier atelier automobile en 1957.

«Si nous ne changeons pas de manière de penser, l'Amérique du Nord n'a aucune chance de rester dans l'industrie automobile, absolument aucune», a-t-il poursuivi. Selon lui, les constructeurs d'automobiles peuvent être concurrentiels s'ils parviennent à mettre fin aux rapports conflictuels qu'entretiennent, selon lui, les employés et les directions.

Négociations «très difficiles»

Selon Mme Merkel, le gouvernement allemand, qui a accepté d'avancer 1,5 milliard d'euros à la future société fiduciaire chargée de transférer Opel de sa maison mère américaine, General Motors, à Magna, «a fait ce qu'il pouvait et ce qu'il devait», au cours de négociations «très difficiles» qui ont été un «test pour les relations transatlantiques».

Pendant la nuit, le ministre de l'Économie, Karl-Theodor zu Guttenberg, aurait même menacé de démissionner, rapporte le journal Bild am Sonntag. Interrogé à la télévision, l'intéressé n'a ni confirmé ni infirmé tout en reconnaissant avoir été en faveur du dépôt de bilan plutôt que d'une intervention financière publique massive, avant de se ranger à la décision gouvernementale.

Désormais, a concédé Mme Merkel, pour Opel et Magna adossé à la banque russe Sberbank et allié au constructeur russe GAZ, «le travail ne fait que commencer, il y a encore beaucoup de difficultés à surmonter».

Les autorités politiques allemandes s'étaient mobilisées depuis des semaines pour sauver Opel, un enjeu crucial à quatre mois des élections législatives.

Le vice-chancelier social-démocrate, Frank-Walter Steinmeier, qui veut succéder à Mme Merkel après le scrutin de septembre, s'est dit à nouveau «très soulagé» hier soir, tandis que les journaux saluaient l'accord annoncé dans la nuit. «Magna sauve Opel!» s'est exclamé le quotidien populaire Bild.

Les négociations, éprouvantes, ont connu plusieurs rebondissements, dont la défection cette semaine de l'italien Fiat, principal autre candidat à la reprise d'Opel. Et le temps était compté pour Berlin, qui voulait à tout prix trouver une solution avant que la maison mère d'Opel, General Motors, ne soit placée en faillite, ce qui pourrait être le cas dès demain.

Magna devrait prendre 20% de la nouvelle société, qui deviendrait la première entreprise automobile canadienne. La banque russe Sberbank détiendrait 35%, GM conserverait 35% et les salariés obtiendraient 10%.