De mémoire d'acériculteur, le temps des sucres n'a jamais commencé aussi tard que cette année. Mais même si la saison s'annonce «moyenne», nul besoin de courir au supermarché pour faire des réserves. Le prix de détail de la conserve ne devrait pas bondir.

Réal Bruneau, propriétaire de l'érablière du même nom, près de Lévis, a commencé à bouillir la sève le 3 avril. «En 40 ans, c'est le plus tard que j'ai vu. D'habitude, on commence vers le 15 mars.» Le problème, c'est que «plus ça retarde, plus la saison va être courte», souligne l'acériculteur. Il s'attend à une «très petite» production.

Dans le Bas-Saint-Laurent, les érables n'ont pas encore beaucoup coulé. «C'est pas mal l'équivalent de 2008. J'aimerais ça être plus optimiste», lance Carlo Ouellet, copropriétaire de l'Érablière La coulée dorée, à Saint-Pierre-de-Lamy. Il a commencé à faire du sirop le 5 avril. La saison 2008 avait été la plus faible des 15 dernières années, avec une production par entaille presque 30% inférieure à la moyenne.

Les affaires seront meilleures en Montérégie, constate Serge Beaulieu, président de la Fédération des producteurs acéricoles du Québec (FPAQ). Propriétaire de 28 000 entailles à Ormstown, il est en pleine période de cuisson, un 15 avril. À son plus grand étonnement. «Depuis 30 ans, le plus tard que j'avais fini, c'est le 10 ou le 12 avril.»

Importante réserve

Même si la saison est anormalement tardive et s'annonce «moyenne», selon Serge Beaulieu, les consommateurs n'en subiront pas les conséquences. L'an dernier, la météo a tellement favorisé les acériculteurs qu'ils ont connu une année record. La production a dépassé 120 millions de livres, soit 50% de plus qu'en moyenne.

Les réserves sont donc abondantes. Avant le début de la saison actuelle, l'entrepôt de Laurierville contenait 66 millions de livres. C'est suffisant pour empêcher une flambée des prix, affirme Caroline Cyr, porte-parole de la FPAQ. La stabilité des prix et de l'offre est d'ailleurs l'un des objectifs de la réserve, note-t-elle. Tant qu'il y a plus de 40 millions de livres entreposées, l'équilibre n'est pas menacé.

L'épicerie en ligne d'IGA vend la conserve de sirop médium 8,99$ et celle de sirop clair 9,99$. Sur le site walmart.ca, elle est offerte à 7,87$ (aucune spécification sur la catégorie).

En 2008, la réserve était tombée à zéro, rappelle Caroline Cyr. Les traditionnelles conserves de 540 ml se vendaient entre 7 et 10$. Mais certaines avaient été vues à plus de 12$. Cette flambée des prix avait encouragé des entreprises à mettre en marché des sirops au goût d'érable, faits à base de riz, entre autres. La FPAQ craignait que cela provoque de la confusion puisque les conserves ressemblaient à celles du véritable sirop, ce qui avait fait couler beaucoup d'encre.

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PRODUCTION DES 15 DERNIÈRES ANNÉES

[Année : Production (millions de lb) | Rendement (lb/entailles)]

1999 : 68,7 | 2,35

2000 : 82,5 | 2,60

2001 : 48,3 | 1,72

2002 : 61,2 | 2,04

2003 : 78,5 | 2,35

2004 : 86,4 | 2,30

2005 : 74,0 | 1,95

2006 : 68,6 | 1,99

2007 : 61,7 | 1,73

2008 : 58,7 | 1,56 (plus bas en 15 ans)

2009 : 109,4 | 2,65

2010 : 88,1 | 2,04

2011 : 101,9 | 2,39

2012 : 96,1 | 2,24

2013 : 120,3 | 2,82 (plus haut en 15 ans)

Récolte moyenne: 80,3 millions de livres (2,18 livres par entaille)

Source : Enquête GREPA et AGECO

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PRIX MOYEN DE LA CONSERVE DE 540 ML DEPUIS CINQ ANS

2009 : 8,54$

2010 : 8,32$

2011 : 8,18$

2012 : 8,14$

2013 : 8,12$

Source : Fédération des producteurs acéricoles du Québec